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  • : SI ÇA VOUS CHANTE (le blog de Fred Hidalgo)
  • : Parce que c’est un art populaire entre tous, qui touche à la vie de chacun et appartient à la mémoire collective, la chanson constitue le meilleur reflet de l’air du temps : via son histoire (qui « est la même que la nôtre », chantait Charles Trenet) et son actualité, ce blog destiné surtout à illustrer et promouvoir la chanson de l’espace francophone ne se fixera donc aucune limite…
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  • Fred Hidalgo
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.

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4 novembre 2022 5 04 /11 /novembre /2022 15:41

Sur les traces (franco-helvétiques) de Frédéric Dard…

Bonnes nouvelles : Frédéric Dard connaît enfin les honneurs de l’Éducation nationale, avec un premier collège à son nom – il aura « seulement » fallu attendre vingt-deux ans après sa disparition –, alors que Le Roman de San-Antonio (qui retrace « le siècle de Frédéric Dard » : 1921-2021) arrive en librairie : il fallait simplement attendre que frappe à sa porte un certain Balzac (éditeur) ! Double occasion de « régler son compte » une fois pour toutes (mais avec une tendresse absolue) au père de l’incomparable comédie san-antonienne…

Saint-Chef. Petite ville du Dauphiné où « Freddy » fréquenta la Communale et fit sa première communion dans son abbatiale. « J’ai eu 12 ans à Saint-Chef… village heureux : je suis allé à l’école – blouse noire étoilée d’encre violette, grosses galoches pleines de boue – dans ce vaste bâtiment de pierre silencieux et délabré où des fenêtres hagardes fixent de leurs yeux crevés de nouvelles, d’incessantes jeunesses. Et là, j’ai commencé à apprendre, non pas l’histoire de France, mais la France tout court… Oui, village heureux où j’ai, pour la première fois, éprouvé les vapeurs de vin et senti résonner en moi le rire des filles*… »

Ce 6 octobre, nous sommes réunis, les principaux membres de sa famille (à l’exception de son fils Patrice, hélas empêché) et des Amis de San-Antonio, pour assister à l’événement : le baptême du premier collège Frédéric-Dard ! Quoi de plus logique que ce soit celui du (beau) village de sa prime adolescence, où la municipalité lui a consacré un musée destiné à rassembler le fonds dardo-san-antonien le plus important de France (et du Navarin, ajouterait Bérurier).

Les autorités officielles du département de l’Isère et de l’académie (pas encore française !) sont venues, elles sont toutes là, parmi les six cents élèves, pour lui donner toute la solennité nécessaire. Une chorale nous accueille avec quelques chansons spécialement choisies, avant que Joséphine, la fille de Frédéric et Françoise Dard – présente avec Abdel, leur fils adoptif, Fabrice, son premier enfant, et les deux enfants de la sœur de Frédéric et du dessinateur Roger Sam – ne dévoile la plaque sous les applaudissements. Forcément, « on » est conscient de l’importance symbolique du moment : aujourd’hui, l’ancien garnement de Saint-Chef qui s’y livra à « maintes facéties d’un goût douteux* » mais qui, avant 15 ans, avait déjà lu Dumas, Hugo, Tolstoï, Zévaco, la comtesse de Ségur… et autre Balzac, n’en reviendrait pas.

En revanche, il serait on ne peut plus sensible au discours prononcé par sa nièce Patricia au nom de la famille :

« Monsieur le président du conseil départemental, mesdames et messieurs les représentants du conseil départemental, de la commune de Saint-Chef, madame la directrice académique, monsieur le principal, chers amis de San-Antonio et vous tous ici rassemblés ; comme tous les membres de ma famille, je suis très honorée et fière de participer à l’inauguration du collège Frédéric-Dard.
» Lorsque Joséphine m’a demandé de prononcer un discours, la question de ma légitimité s’est imposée. Pourquoi moi ? Mais ma cousine possède un talent certain de persuasion, alors j’ai accepté, il ne faut pas se mettre la rate au court-bouillon !
» La légitimité est d’abord familiale. Comme mon frère, François, ici présent, son neveu, je suis la nièce de Frédéric Dard, la fille de son âme sœur Jeannine, la petite-fille de Francisque, son père, et de Joséphine Cadet, sa mère, qui repose au cimetière de Saint-Chef.

» Ensuite la légitimité est peut-être dans ma vie professionnelle. Comme Marie-Marie, la nièce de Bérurier, je suis enseignante. Enfin je l’ai été puisque je suis à la retraite depuis un an. Pendant trente-neuf ans j’ai enseigné l’histoire et la géographie en collège puis au lycée ; mon dernier poste ayant été au lycée l’Oiselet de Bourgoin-Jallieu, autre clin d’œil à Frédéric Dard.
» Alors comme ex-enseignante, je ne peux que me réjouir et remercier le conseil départemental d’avoir choisi le nom de Frédéric Dard pour veiller à la scolarisation des quelque 600 élèves de ce collège. Il y a du panache et de l'audace dans ce choix.
» J’aimerais que les élèves soient fiers de ce nom car aucun autre collège ne le porte. Fiers surtout car ce nom porte en lui des valeurs, des principes, une forme d’esprit, qui loin de se contredire, se complètent.
» Étudier au collège Frédéric-Dard devrait être, selon moi, gage d’ouverture d’esprit, de curiosité, de générosité, d’humour et devrait vacciner de la médiocrité, de la bêtise, de la méchanceté, sans angélisme et naïveté pour autant. Mais que les élèves le sachent : on ne devient pas un auteur à succès, un génie de la littérature en un claquement de doigts. Frédéric Dard c’est la légèreté, l’irrévérence, l’insolence, la “déconne” mais c’est aussi le travail, l’effort, le doute, l’échec dont on se relève, la recherche du juste, l’exigence.
» Que me dit, que me souffle à l’oreille Frédéric Dard à moi, élève de collège ? Il me dit : “Allez mon gars, allez ma fille, va au bout de tes rêves, tout est possible mais mouille le maillot, travaille, bats-toi, crois en toi ; n'écoute pas les cyniques, les méchants, les défaitistes.”
» Et à moi, enseignant(e), que me souffle-t-il à l’oreille ? Il me dit la même chose : “le travail, l'exigence, la rigueur”, mais d’ajouter : “mets de l’humour dans tes cours, de la fantaisie dans ta pédagogie et tu verras, tu les harponneras.”
» Ainsi, puissent les élèves de ce collège se construire, s’épanouir, s’enrichir pour devenir des hommes et des femmes instruits, curieux, libres et sans préjugés comme Frédéric Dard aurait aimé qu’ils deviennent. »

UN ÉCRIVAIN COUPABLE DE TOUS LES MAUX

À vrai dire, s’il faut se réjouir de l’événement et féliciter les responsables de Saint-Chef et du département de ce choix mille et une fois justifié, comment ne pas s’étonner qu’un tel génie de la littérature, en effet (champion du chamboule-tout avec des coéquipiers nommés Rabelais, Villon, Céline, Allais, Prévert et autre Queneau), ne compte pas encore, à l’instar des susnommés, de peintres, de poètes, de musiciens, de philosophes ou de certains chanteurs, des collèges et lycées par dizaines à son nom ? Serait-il moins honorable que ceux de Brassens, Brel, Henri Dès, Yves Duteil ou… Pierre Perret (héritier évident de San-Antonio dans le vocabulaire) ?

Pour avoir connu les péripéties que l’on sait avec mon Roman de San-Antonio – l’éditeur initial qui jette l’éponge, sans l’avoir lu, au simple motif qu’il ne saurait vendre « une telle somme » sur cet auteur, et les deux ou trois autres, ensuite, qui ne tarissent pas d’éloges à son sujet tout en s’avouant « désolés », pour les mêmes raisons, d’être « empêchés » de le publier, qu’il se présente en un ou deux tomes –, j’ai fini par me faire ma religion. Ne faudrait-il pas y voir, comme pour les établissements scolaires qui pourraient s’honorer de porter le nom de Dard mais ne se s’y risquent pas, un signe des temps où la frilosité générale s’accompagne (ou naît ?) d’un « wokisme » castrateur ?

Pensez ! Avec tout ce que San-Antonio a publié de pendable, les braves gens qui « n’aiment pas que l’on suive une autre route qu’eux » ne sauraient voir aujourd’hui en lui et en ses (bons) mots qu’un écrivain coupable des maux les plus affreux : « de biphobie, de cissexisme, de grossophobie, d’homophobie, de lesbophobie, de psychophobie, de religiophobie, de transphobie, de validisme, j’en passe et des pires comme la misogynie, la misanthropie et le racisme… évidemment ! Voire de handicapophobie, je néologise, pour oser moquer la phénoménale difformité (sexuelle) dont souffre Monsieur Félix* » (un de ses personnages récurrents qui n'est pas sans rappeler un certain Louis-Ferdinand Destouches).

Là, San-Antonio entonnerait son couplet sur les cons, capables de le rendre xénophobe, s’agissant à l’en croire des seuls « véritables étrangers de l’existence »… N’empêche que la question est posée : « En cette époque si peu épique, tristounette, castratrice et révisionniste où l’humour, autre que potache, incolore, inodore et insipide, dénué d’audace, ne court plus guère les rues* », pourrait-il continuer d’écrire d’aussi truculente façon sans que les tenants de la cancel culture ne lui tombent sur le paletot à tout propos jusqu’à le clouer au pilori ?

« Un mot de travers, même au second degré de moins en moins perceptible par la cohorte grandissante des ignares (qui croient tout savoir) et des honnêtes gens aux bonnes manières (s’érigeant volontiers en juges sentencieux), cautionnés par les spécialistes des petites phrases et du moindre embryon de polémique potentielle, estampillés info continue, et il serait taxé de toute l’ignominie du monde*. » À moins qu’il ne trouve au contraire, stimulé par les circonstances, un moyen inattendu, à la hauteur de son génie, de contourner les limites désormais imposées à la liberté d’expression ?

Moralité : pour la « défense et l’illustration » de Frédéric Dard dit San-Antonio en 2022, lequel tentait simplement dans ses écrits d’exorciser son désespoir face à l’incommensurable bêtise humaine (cf. Brel, « désespéré mais avec élégance »…), il y faut, c’est certain, « du panache et de l'audace ». Comme à Saint-Chef en Dauphiné et comme en Roussillon, au pays de l’irréductible Pablo Casals, où Balzac éditeur (dont les rencontres littéraires et musicales estivales autour de Brel et de Trenet ont scellé notre rapprochement) a décidé dard-dard d’ajouter Le Roman de San-Antonio à son catalogue. Six mois après une édition collector à tirage limité, nominative et numérotée, rendue possible grâce aux amis de San-A. et de la chanson.

On avait craint, un temps, que sa sortie en librairie, avec ses deux tomes, ne relevât des Illusions perdues. C’était compter sans Balzac*, justement, grâce auquel le « grand public » aura accès à cette maxi-dose de San-Antonio (si toutefois les médias veulent bien s’en faire l’écho) ; où l’on découvre une pensée certes politiquement incorrecte mais tellement visionnaire (c’est fou ce qu’il reste actuel !), révolutionnaire et jubilatoire qu’elle devrait, c’est sûr, « vacciner de la médiocrité, de la bêtise et de la méchanceté ».

À travers cette double histoire de Frédéric Dard et du « féal de [ses] féaux », m’a dit un journaliste tout récemment, « c’est plus qu’une biographie d’un grand écrivain, plus qu’un témoignage inédit que vous proposez : c’est l’Homme dans son époque que vous décrivez sous forme d’un récit où tout le monde peut se reconnaître. » Merci, m’sieur ! Rétrospectivement, votre commentaire m’a fait regretter de n’avoir pas utilisé en exergue de l’ouvrage cet avertissement éloquent de San-Antonio (tiré comme par hasard de J’suis comme ça) :

« Levez la main droite et dites je le jure.
– Je le jure !
– Baissez la main. Les personnages de ce récit sont-ils purement imaginaires et fictifs ?
– Je le crois, mais comme disait une femme adultère : tout le monde peut se tromper.
– Toute ressemblance avec des personnages existant ou ayant existé ne serait-elle que pure coïncidence ?
– Sûrement pas, car tous les hommes se ressemblent. Ils sont groupés par catégorie. Il y a les c… ; les moins c… ; les pas trop c… et les autres, c’est-à-dire les très c… Il n’y aurait donc rien de surprenant si certains lecteurs se reconnaissaient dans ces pages. »

Tout compte fait, il y a une morale dans cette comédie humaine. Parce qu’ils ont les foies, les demi-sels se font la malle ? Qu’à cela ne tienne, on n’en meurt pas et il reste toujours au moins un cador chez messieurs les hommes pour régler son compte à la frilosité ambiante. Résultat : faites chauffer la colle pour la fête des paires (tire-m’en deux, c’est pour offrir !), car ceci est bien une pipe… Et nous voilà ce soir : champagne pour tout le monde ! Pour la suite, le travail d’info éventuel des journalistes, nul besoin de se mettre la rate au court-bouillon : advienne que pourra et en avant la moujik !

__________________

* Pour mémoire, l'auteur de La Comédie humaine fut également éditeur (notamment des Oeuvres Complètes de Molière).

MOI, L’AUTEUR DE JALLIEU…

En attendant – petite leçon en forme de San-Antonio pour les nuls – je vous propose de partir ensemble sur les traces de Frédéric Dard. Suivez le guide. On a commencé par la fin, par Saint-Chef où il repose aujourd’hui, sous une dalle qu’il a voulue à ses deux noms (« Frédéric Dard dit San-Antonio, 1921-2000 »), avec vue quand la météo sourit sur le mont Blanc. Le temps de quelques confidences discrètes, quasiment filiales, qui ne regardent personne… et nous opérons un saut d’une vingtaine de kilomètres (et de soixante-dix-huit ans !). Jusqu’à Jallieu, où le futur romancier naquit le 29 juin 1921 au premier étage, 75 Grande Rue (aujourd’hui rue de la Libération), du bureau de poste : quoi de plus normal pour quelqu’un appelé à devenir un homme de lettres !

Baptême à l’église toute proche, puis – après un « détour » d’une soixantaine d’années par Saint-Chef, Lyon, Les Mureaux, l’île Saint-Louis, Gstaad et Genève – retour à Bourgoin-Jallieu en 1982 (les deux villes ont fusionné en 1967) pour la pose officielle d’une plaque sur sa maison natale, en présence de son père Francisque. « Je me rappelle le bureau de poste où je suis né et qui reste obstinément clos depuis. Comme s’il attendait que je disparaisse pour trouver une nouvelle vocation*. » Aujourd’hui, il est le siège intermittent d’associations locales… Souvenirs, souvenirs : « À cause de Bourgoin-Jallieu, j’ai pu mesurer à quel point nous sommes les enfants de notre enfance. Je sais maintenant combien sont essentiels, riches et fertilisants les premiers souvenirs d’un homme. Je me reverrai toujours, accroché à la main de ma grand-mère, par les rues silencieuses de Jallieu*. »

Quatre ans plus tard, Frédéric Dard revient sur ces mêmes lieux pour inaugurer le « Bar San Antonio » (sans trait d’union, pour éviter tout problème avec l’éditeur). Avant de le laisser couper le ruban (un collier de neuf mètres de saucisses !), on lui fait parcourir la ville dans une Citroën décapotable de 1931 (avec Françoise et Joséphine), ovationné par les habitants.

Il faut dire qu’entre-temps, celui qui signe désormais tous ses livres « San-Antonio » (depuis qu’en 1979, à l’occasion de Y a-t-il un Français dans la salle, l’auteur de romans noirs à l’écriture ciselée a « opéré la jonction » avec la luxuriance san-antonienne) a publié son chef-d’œuvre, Faut-il tuer les petits garçons qui ont les mains sur les hanches ?, où le narrateur se nomme… Charles Dejallieu (lumineux pour qui sait que Dard se prénommait Frédéric Charles Antoine et que ses deux premiers prénoms lui servirent longtemps de pseudonyme).

Mais reprenons le cours de notre voyage. Impossible de quitter Bourgoin-Jallieu, ses place et rue Frédéric-Dard, sans un clin d’œil à l’Objet Dard érigé et inauguré en 2004, en présence de la famille : un ouvrage à son image, d’une taille impressionnante (deux mètres de haut sur six de large), réalisé par le plasticien Bertrand Lavier. Ni une pyramide ni un obélisque, encore moins un mur des lamentations, mais « un anti-monument funéraire » où sont gravés en rose fluo sur du granit vert les titres des 174 San-Antonio (en format de poche), de Réglez-lui son compte ! à Lâche-le, il tiendra tout seul. L’occasion de pointer du doigt Ceci est bien une pipe, qui fêtait en 1999 les 50 ans de San-Antonio et de son Grand Connétable de la San-Antoniaiserie (suivez mon regard), intronisé pour la vie dans cet antépénultième épisode de la saga. Un an plus tard, un an seulement, Frédéric tirait sa révérence à Bonnefontaine…

 

SAN-ANTONIO FAIT SON TROU EN BASSE-GRUYÈRE

Nous y voilà dans ce petit village de Suisse (encore) romande, à quelques encablures de l’alémanique Fribourg. Bonnefontaine. Là où « l’auteur de Jallieu », comme il se qualifiait lui-même dans ses écrits, a vécu ses dernières années, dans une vieille ferme qu’il avait rénovée et conservait en activité, baptisée L’Eau vive… Si je ne vous ai pas dit cent fois que « Frédo » adorait la chanson autant que moi, je ne vous ai jamais rien dit ! Un saint Antoine (forcément) nous accueille sur le seuil du saint des saints du paradis san-antonien.

J’en connais qui se damneraient pour y passer la nuit : son bureau à l’étage, dans un recoin de sa chambre, où il écrivait exclusivement ses romans ; le salon-bibliothèque du rez-de-chaussée où il s’attelait à ses pièces de théâtre et répondait à son courrier… Ses livres, qui recouvrent les murs de l’escalier et de toutes les chambres. Les siens, la plupart de ses originaux – son premier San-A. publié à Lyon en 1949 mais aussi ses premiers textes signés Dard, depuis La Peuchère en 1940, et tous les autres romans sous pseudos de sa période lyonnaise (il n’arrivera aux Mureaux qu’en mars 1949) – et ceux de ses auteurs de prédilection, par centaines ; tiens, dans le lot, un Putain de chanson d’un certain Hidalgo et le Trenet de Cannavo publié chez Hidalgo Éditeur… Ses photos, celles des siens, sa présence partout entre ces murs, fantomatique et pourtant presque palpable. Sa chambre… où il est mort le 6 juin 2000.

J’ai cité La Peuchère, son premier texte publié en 1940, une grande nouvelle écrite à 17 ans… Incroyable surprise ! Joséphine et Abdel nous offrent la primeur d’un document unique entre tous : la maquette du futur ouvrage réalisée et annotée à la main par le jeune Frédéric en personne ! Le saint des saints, cette fois-ci, de son œuvre. Émotion. Merci Joséphine, merci Abdel, merci de nous avoir permis de feuilleter ces pages si modestes marquant paradoxalement la naissance d’une immense carrière, et merci de nous permettre d’en reproduire ici la couverture en « exclusivité mondiale » ! Un travail artisanal, à la valeur affective à présent inestimable, destiné à rejoindre le Musée Frédéric-Dard de Saint-Chef en Dauphiné.
 

AU MUSÉE FRÉDÉRIC-DARD DE SAINT-CHEF

Encore en herbe, celui-ci offre déjà un concentré de la vie et de la carrière de Frédéric, retracées par différents panneaux : illustrations diverses, affiches de films adaptés de ses livres et/ou dialogués par lui, affiches et programmes de ses premières pièces de théâtre, correspondance, photos de ses parents et grands-parents… et même du dénommé Louis Berruyer, l’unijambiste qui lui inspira son personnage de Bérurier ! Ses livres évidemment, en éditions souvent originales, pas loin de trois cents (vendus à 220 millions d’exemplaires de son vivant, mais parfois, pour les premiers, tirés seulement à quelques centaines), ainsi que ceux des « Nouvelles aventures de San-Antonio » signées Patrice Dard.

Enfin, son dernier bureau venu directement de Bonnefontaine et puis, bien protégée sous une cloche en verre, sa dernière machine à écrire (une IBM électrique à boule) sur laquelle – ô étranges et fascinantes circonvolutions du hasard – est glissée la page d’un San-Antonio où figurent quelques corrections manuscrites. Sur des dizaines de milliers de pages tapées par le Grand Frédéric, il a fallu que celle-ci soit précisément celle, tirée du tapuscrit de Ceci est bien une pipe, où il me proclame Grand Connétable de la San-Antoniaiserie !!! « Je connaissais la chanson, paroles et musique, comme dirait mon cher Fred Hidalgo, le plus féal de mes féaux… »

À BONNEFONTAINE AVEC BÉRURIER ET LES SAINT-CHEFFOIS

Mais pour l’heure, nous sommes toujours en Suisse où nous attendons des amis de Saint-Chef, justement, membres de son comité de jumelage. Figurez-vous que le village où Frédéric vécut adolescent est jumelé depuis 1982 à celui où il fit son trou en Basse-Gruyère ! Il y a des projets dans l’air et de la convivialité à tous les étages. À l’extérieur, le compère Bérurier (alias Marc Armanet) m’a rejoint dans le « jardin Frédéric-Dard » pour commenter la raclette en préparation et les vins ad hoc auxquels il n'a pu s'empêcher de jeter un coup d’œil... Pinaud, frileux, a dû rester près de la cheminée du salon, la goutte au nez et un verre de muscadet en main.

Pour sceller l’amitié franco-helvétique, nous voilà ensuite réunis autour de la fontaine du village, en compagnie du joyeux maire de Saint-Chef en Dauphiné, Alexandre Drogoz, et de son équivalent suisse, le « syndic » Nicolas Lauper. Normal pour un bourg nommé Bonnefontaine. Sauf qu’il fallut attendre Frédéric pour voir renaître une fontaine dans la commune… Elle fut inaugurée en sa présence le 5 mai 1991, avec cette inscription signée Dard : « La seule vraie richesse, c’est l’eau. » On en convient sans difficulté en trinquant les uns les autres en mémoire de lui, deux fois plutôt qu’une, avec le jus de la treille local, le sympathique blanc du cru, avant d’aller déguster de succulents plateaux de fromage, dont un « San-Antonio » pas piqué des hannetons et suffisamment bien arrosé pour nous rendre chèvre !


AU PARADOU DE FRÉDÉRIC ET FRANÇOISE DARD

Enfin, chacun s’éparpille en prenant date pour de futurs lendemains qui chantent. Notre séjour privé au « Paradou », près de Genève – où vivaient Frédéric, Françoise et leurs enfants Abdel et Joséphine, jusqu’à ce que celle-ci fût kidnappée en février 1983 – relève ensuite de l’intime. Françoise Dard reste une jeune femme de 80 ans (oui, je sais, mais elle les porte tellement bien…), aussi avenante que lorsque je l’ai connue il y a plus de cinquante ans (!), pleine de vie, d’allant et d’envie que l’œuvre de Frédéric survive à l’homme. À une journaliste du Dauphiné Libéré qui lui parlait du Roman de San-Antonio, Françoise insistait pour qu’elle note bien que « c’est l’ouvrage le plus juste jamais écrit sur Frédéric »

Des bouquins et des bibliothèques, la maison en regorge, véritable caverne d’Ali Baba pour l’admirateur de l’écrivain. Voici son salon qui accueillit tant d’amis, d’Albert Cohen à Léo Ferré ; sa chambre, la nôtre… avec un tableau composé de couvertures de ses livres et d’un portrait signé par lui « à Françoise, éperdument ». Bien sûr, son bureau où il écrivit moult chefs-d’œuvre… et les deux cents premières pages de Faut-il tuer les petits garçons qui ont les mains sur les hanches.

Être hypersensible, Frédéric Dard « sentait » souvent les drames à venir (il n’était pas du genre à s’en vanter mais ses proches témoignent de ce don indéniable et un peu effrayant). En l’occurrence, comme si la mise en abyme de la fiction avec le monde de « l’auteur de Jallieu » ne suffisait pas, Frédéric, pris d’une surprenante prémonition, vit son roman brusquement projeté dans la plus improbable et cruelle des réalités. Juste avant l’enlèvement de Joséphine, chloroformée dans sa chambre du premier étage, à laquelle le ravisseur avait accédé par une échelle, pendant que ses parents dormaient, le romancier « à grands tirages » Charles Dejallieu avait imaginé le rapt de sa belle-fille…

Par bonheur, après de rocambolesques péripéties, tout rentra assez vite dans l’ordre, mais, se sentant coupable d’avoir défié le destin, Frédéric remisa son texte dans un placard, décidé à l’oublier, et s’installa à Bonnefontaine. Il se rappela pourtant à son bon souvenir quelques mois plus tard et fit de ce livre interrompu une merveille d’humanité. En couverture un petit garçon, les mains sur les hanches pour masquer une infirmité qui le handicapa durant toute sa vie…

Comment, vous ne l’avez pas (encore) lu ? Quelle chance vous avez ! Et vous autres, qui ne connaissez toujours pas San-Antonio (vous êtes bien à plaindre si vous ne faites rien pour y remédier) sous prétexte qu’il n’est plus en odeur de sainteté aujourd’hui où le moindre sein échappé d’un décolleté effarouche le monde entier, méditez donc cette déclaration du grand Descartes à son sujet, après avoir lu un de ses livres sur épreuves : « …Ça n’a pas été une épreuve pour moi ! San-Antonio vient de me faire comprendre ce qu’aurait dû être ma carrière. Jamais on n’est allé aussi loin dans la fantaisie. Jamais imagination ne s’est à ce point libérée des contingences. Pour San-Antonio, seul compte l’humour. Il va jusqu’au bout de son propos qui est de nous faire rire. Rien ne l’arrête, pas même la réalité, car la réalité est banale. Que n’ai-je adopté en mon temps sa méthode ? J’aurais ainsi évité bien de vains discours ! »

CQFD ? Sans doute. Laissons pourtant le mot (cartésien) de la fin à Frédéric Dard : « Si San-Antonio n’existait pas, je l’aurais inventé ! »

_______________

*La plupart des citations figurant dans cet article sont tirées du Roman de San-Antonio. Disponible en librairie dès ce 14 novembre 2022 (et sur les principales plateformes de vente en ligne : Fnac, Mollat, le Furet du Nord, Amazon, LaLibrairieDecitre, DialoguesChapitre, etc.) chez Balzac éditeur. Qu’on se le dise et – mieux encore, si vous l’avez apprécié avec son édition collector parue en avril – vous aurez à présent tout le loisir de le conseiller à vos amis, voire de l’offrir en cadeau à l’occasion des fêtes de fin d’année…

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18 octobre 2022 2 18 /10 /octobre /2022 11:30

... et le facteur sonne toujours deux fois !

Pour paraphraser le titre du spectacle consacré au Grand Jacques qui tourna longtemps en Amérique, Paco Ibañez est vivant, il va bien et vit désormais à « La Porte des Étoiles » ! Celles des grands poètes hispanophones qui continuent de briller au firmament grâce à son incomparable mise en musique et en bouche. Dernières nouvelles du front de la résistance à l’inculture galopante...

Oui, Paco va bien, malgré sa mésaventure vécue fin juillet à Sète qui, à la suite de mon témoignage, a provoqué d’innombrables réactions de soutien à l’artiste (ainsi que quelques excuses aussi nécessaires que bienvenues, mais chut, cela ne regarde que lui... et les amis qu’il a bien voulu mettre dans la confidence), et ses chansons se veulent toujours une arme chargée de futur.

Bonnes nouvelles, donc, depuis sa Porte des Étoiles, la bien-nommée (en français dans le texte !), où nous avons eu le bonheur, encore une fois, de partager l’humanité de ce frère d’âme de Brassens, Ferrat, Ferré, Moustaki, Leny Escudero et autre Nilda Fernandez. Son rejet existentiel de l’intégrisme et de tous les extrémismes qui minent la nécessaire convivencia, le vivre ensemble ; sa révolte contre l’injustice sociale ; sa colère face au déclin culturel et linguistique au profit d’une américanisation des mœurs et du langage, par indifférence ou manque général de vigilance ; sa tendresse à fleur de peau… Et son humour dont il ne se départit jamais, souvent ravageur et provocateur en public comme en privé, parfois perceptible uniquement dans son regard pétillant de malice.

Ce jeune homme de 88 ans, le 20 novembre prochain, arbore depuis peu une barbe qu’il porte beau… et prépare un nouvel album, Érase una vez (Il était une fois) ! Il nous en a offert la primeur des titres et de la maquette, illustrée par un artiste de renom (superbe, en forme de livre-disque) :

« Tout est prêt, dit-il.
– 
Et alors ?
– Il ne reste plus qu’à enregistrer les chansons !
– En guitare-voix ?
– Non ! Avec mes musiciens : Mario (Mas) à la guitare, Cesar (Stroscio) au bandonéon, Joxan (Goikoetxea) à l’accordéon, un contrebassiste peut-être, ou un violoncelliste…
Et donc ?
– 
On va répéter ici, dans la grande salle que tu as vue en sous-sol, mais d’abord il faut qu’on installe le studio. »

 

Ah oui ! Je ne vous ai pas dit que sa « Porte des Étoiles », ça n’est pas seulement la fenêtre grand ouverte, la nuit, sur celles-ci, loin des lumières de la ville – de Barcelone en l’occurrence, qu’il vient de quitter après y avoir vécu plus de trente ans –, c’est aussi une bâtisse spacieuse en restauration où toutes les archives d’une vie et une bonne part de celles de son label A Flor de Tiempo doivent encore être classées. Puis numérisées avec le concours des services d’une grande Université. Il faudra donc patienter quelque peu, le temps de monter sur place un studio d’enregistrement, pour voir se réaliser ce nouvel album au titre induisant un monde à l’envers qui tournerait enfin rond.
 

 

De la patience, Paco n’en a jamais manquée. La preuve : jadis et naguère, avant qu’il ne retourne vivre en Espagne, je lui avais annoncé une lettre de ma part, postée à Paris mais jamais parvenue à destination. Il n’y avait pourtant que quelques centaines de mètres entre le bureau de poste de la rue Littré et son adresse d’alors, rue Delambre… Depuis, sujet de plaisanterie récurrent entre nous, il faisait mine de l’attendre comme l’Arlésienne… Je ne vous raconte pas les pérégrinations surprenantes qu’a dû connaître cette lettre entre-temps, par monts et par vaux postaux, toujours est-il qu’elle a fini par me revenir (en France), pour que je l’emporte et la remette enfin, en mains propres (en Espagne), à son destinataire, tenez-vous bien : cinquante-deux ans plus tard !!!

« Tu te souviens, Paco, de ce film intitulé Le facteur sonne toujours deux fois ? Eh bien voilà, je suis ce facteur… Tiens, c’est ma tournée ! »

D’abord, il pense à une blague. Il se saisit de l’enveloppe que je lui tends, l’examine sous toutes les coutures. Pas possible ! Je n’avais pas affabulé ! Il était bien le destinataire du courrier en question. À une adresse qu’il connaissait bien : « Monsieur Paco Ibañez, Hôtel Namur, 39 rue Delambre, Paris 14 ». Il hallucine en découvrant le cachet de la poste : l’enveloppe a été affranchie le 2 décembre 1970 ! Recto-verso, des tampons « Non réclamé » en date du 7-12-70 et « Retour à l’envoyeur » le 28-12-70…

Il me demande, circonspect, s’il peut l’ouvrir. « Elle n’attend que ça depuis plus d’un demi-siècle, elle t'appartient ! » Paco chausse ses lunettes, attrape un couteau et décachète soigneusement le pli. Nous finissons alors un somptueux bœuf bourguignon de sa préparation, arrosé par un excellent vin du Roussillon griffé « Fred » ! Je l’avais prévenu d’une surprise de taille pour le dessert... Il a bien tenté d’en savoir plus pendant les agapes, sans pouvoir imaginer ce mot rescapé d’un temps où la gent féminine (et pas que !) cherchait à attirer l’attention du séduisant jeune homme qu’il était.

Il sort la feuille, la déplie. Comme l’enveloppe, elle est de couleur bleue. Il commence à la lire à haute voix. Je suis aussi fébrile que lui, ne me souvenant que de l’objet principal de ses lignes. Cinquante-deux ans, vous pensez ! Nous sommes venus en compagnie de Jo Masure, directeur-fondateur du festival « Alors chante… ! » de Montauban (hélas disparu), qui n’a pas revu Paco (autrement qu'en spectacle) depuis belle lurette. Jo a apporté le livre d’or du festival et de l’association « Chants Libres », créée en amont, qui l’avait déjà programmé au théâtre de Montauban. C’était le 8 novembre 1983, comme en témoignent une photo et une dédicace de l’artiste en espagnol (« La vie est faite de chemins, et dans les chemins des amis attendent et croient en […] ce chant libre que nous chantons jour après jour… »). Présente également, une actrice et poétesse basque, Tachia Quintana, qui entretint des liens étroits d’amitié avec Blas de Otero et Gabriel Garcia Marquez…
 

 

La voix du chanteur donne vie à mes mots maladroits d’antan :

« Cher Paco,
Permettez-moi de vous appeler ainsi, bien que nous ne nous soyons malheureusement pas encore rencontrés. Pourtant, cela aurait pu se produire à plusieurs reprises… »

Il me regarde, l’œil interrogatif, sachant que ces lignes lui étaient intimement réservées. Mais il y a prescription. Je laisse faire… et dire. Alors, il reprend la lecture : « J’ai 21 ans, je suis fils de parents espagnols réfugiés politiques, je termine cette année des études de journalisme, et j’admire beaucoup votre travail de compositeur-interprète. Depuis deux ou trois ans déjà, j’attends la possibilité de vous rencontrer. Naturellement je possède tous vos disques, et je suis allé vous entendre à la Mutualité et à l’Olympia. Ce dernier récital était d’ailleurs formidable. »

Bon, le décor est planté. Si la prose est ordinaire, les invités retiennent leur souffle, conscients de participer à un moment rare, comme passagers d’une machine à remonter le temps… D’ailleurs, la voix de Paco s’enraye quelque peu comme s’embuent ses prunelles à l’évocation de Rogelio, son frère aîné, excellent comédien, qu’il aimait énormément. Séquence émotion. « J’ai rencontré votre frère, Rogelio, à plusieurs occasions, notamment au bar de la rue Delambre qui est son quartier général. Après avoir vécu en province, à 80 km de Paris, j’habite maintenant boulevard Montparnasse. Or, j’ai appris par Rogelio que vous viviez rue Delambre. Tout près de chez moi ! Il m’a dit que vous êtes actuellement à Barcelone, mais que vous deviez rentrer vers le 11 ou 12. Ce serait vraiment un très grand plaisir de pouvoir vous rencontrer. Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je vous téléphonerai alors. […] C’est pourquoi je préfère vous envoyer cette lettre sans plus tarder… »

Paco, sérieux comme un pape : « Tu as bien fait ! Imagine si tu ne me l’avais pas envoyée… On ne se serait sans doute jamais rencontrés ! » Rire général qui détend subitement l’ambiance. Et le destinataire de cette missive du temps passé qui ne se rattrape guère, de relire l’adresse : « Hôtel Namur… Quand même, ils auraient pu me prévenir plutôt que de retourner la lettre à la poste. Tu t’es trompé, ou bien tu as mal compris ce que t’a dit Rogelio. J’habitais juste à côté, mais les gens de l’hôtel me connaissaient bien et mes amis y descendaient quand ils venaient me voir. »

Il n’y a pas de mal, puisque tout est bien qui finit bien. Il fallait simplement attendre la seconde tournée du facteur. La preuve que la Poste française a beau connaître des ratés, rien ne s’y perd pour autant. Cocorico ! La suite de l’histoire ? Dix ans en Afrique et retour début 1980 pour créer Paroles et Musique. Au sommaire du n° 1 paru le 15 juin, mon compte rendu du concert de Paco, en mai, à Bobino. Comme son titre l’indiquait, « Une arme chargée de futur », ce fut l’occasion de notre première vraie rencontre, annonciatrice de nombreux lendemains qui chantent. Moralité : si le facteur sonne toujours deux fois, la vie vous donne aussi, toujours, une seconde chance.

Il était une fois Paco Ibañez… En attendant d’enregistrer son prochain album, le porte-parole des poètes, prince des mélodies, continue d’arpenter les scènes. Juste après une opération pour laquelle il a dû subir une anesthésie générale dont il a peiné à se remettre (« Le chirurgien était un admirateur… et je me suis endormi en m’écoutant car il m’a opéré sur mes chansons ! confie-t-il l’air goguenard, tu le crois, ça ?! »), il a offert (dans tous les sens du terme...) à Sète un concert exceptionnel en hommage à Brassens, en compagnie d’amis musiciens et chanteurs (dont Quico Pi de la Serra qui a adapté le Sétois en catalan).

Ce 23 juillet, dans le magnifique écrin, quasiment comble (1500 places), du Théâtre de la Mer où les goélands planaient sous la lumière des projecteurs, comme autant d’âmes immaculées des poètes qu’il ressuscite en majesté à chaque spectacle, Paco m’avait réservé un tour à sa façon. Une première en ce qui le concernait… et une surprise pour les spectateurs en me voyant débouler, aux dernières lueurs du jour, la Méditerranée en fond de scène, avant l’artiste. Et pour moi donc, « obligé » par celui-ci de le présenter presque au débotté. Juste le temps de prendre quelques notes… Comme si l’on présentait Paco Ibañez, surtout auprès d’un public de connaisseurs ! Mais allez donc refuser quoi que ce soit au « Maestro »

De retour sur « las tierras de España » (cf. A galopar…), il a repris aussitôt le chemin des planches, simplement entrecoupé de son déménagement jusqu’à « La Porte des Étoiles » d’où l’on aperçoit le versant sud de « la montagne sacrée des Catalans », le pic du Canigou. Le 8 octobre dernier, il était au pays de Miguel Hernandez*, dans la province d’Alicante, et le 28 il sera à Jaen (dont il a chanté comme nul autre les Andaluces cueilleurs d’olives). Il est attendu ensuite, le 20 novembre, à Getxo (Pays Basque) puis le 16 décembre à Badajoz.

______________
*En mars 1940, Miguel Hernandez est condamné à mort par les âmes damnées de Franco, avant que la sentence (le poète étant déjà considéré comme l’un des plus importants du XXe siècle) ne soit commuée en trente ans d'emprisonnement... Mais, atteint de tuberculose, il meurt le 28 mars 1942 dans une prison d’Alicante.

 La France ? « Capitale du monde de la chanson », dit-il en ajoutant que « Brassens en est l’empereur », il l’a parcourue dans tous les sens au cours des décennies, seul chanteur non francophone à s’y produire dans une langue étrangère, toujours devant des salles combles. Paris ? La Mutualité, Bobino, l’Olympia, les Folies-Bergère, le Trianon, le Casino de Paris, le théâtre des Champs-Élysées, le Châtelet et j’en passe sans doute, toutes les grandes scènes l’ont également accueilli triomphalement.

À qui le tour à présent ?
À qui
l’honneur (et l'immense plaisir) de l’inviter ?
À suivre, au grand galop !
 

_____________
Site de l’artiste (A Flor de Tiempo)

NB. Pour rappel, si ça vous chante : « Le cadeau de Paco Ibañez à Edgar Morin » (avec d’autres liens renvoyant à Paco sur ce blog).

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30 juillet 2022 6 30 /07 /juillet /2022 08:39

C’est la fête des paires !

On le sait, l’édition « collector » (hors commerce) de cet ouvrage a été un succès. Depuis son envoi aux souscripteurs, deux mois se sont écoulés… et vous avez été nombreux, depuis, à m’interroger sur sa réception critique en me faisant part de la vôtre. Curiosité d’autant plus légitime qu’en l’absence de diffusion, on ne peut confronter sa propre opinion à d’éventuels avis médiatiques*. Et curiosité partagée : si un auteur écrit d’abord pour lui-même (sauf à vouloir fabriquer un produit formaté de consommation courante), les retours de son lectorat – surtout s’il a choisi de l’interpeller au fil des pages – lui sont aussi nécessaires que son pain quotidien.

En l’occurrence, après avoir dépassé la déception causée par une certaine frilosité du monde éditorial (pour lequel « le potentiel commercial » de cet ouvrage avait été jugé « trop faible »), puis mis en place un financement participatif pour le publier malgré tout, j’attendais avec fébrilité vos premiers commentaires. Sans trop d’impatience cependant, vu le volume de ce Roman de San-Antonio (qui retrace et boucle « le siècle de Frédéric Dard » : 1921-2021) en deux tomes... Aujourd’hui, je suis rassuré (ô combien !) sur son bien-fondé et heureux de pouvoir vous livrer un florilège d’extraits de vos réactions, certifié rigoureusement conforme (malgré l’absence délibérée de signatures, faute d’avoir sollicité votre accord de publication) et parfaitement représentatif de l’ensemble des commentaires reçus à ce jour. Qui sait si, à leur lecture, un éditeur n’aura pas envie de sortir l’ouvrage en librairie ?

 

Vos (premiers) commentaires de lecture

• Bravo pour avoir mené à bien ce colossal projet…

• À la seule vue des couvertures, avec son regard bienveillant et son sourire qui font déjà du bien, j’ai compris d’emblée que ces livres me feraient croire encore un peu en l’humain…

• J’en savoure toutes les pages…

• Merci pour ce radieux début d’été passé à lire dard-dard ce superbe « roman »…

• J’ai l’impression de (re)faire partie de la famille san-antonienne comme avec Frédéric : merci pour ça…

• Une “somme” qu’il faut prendre le temps de déguster…

• Je me régale à lire ce que je n’aurais pas peur de nommer un “monument”, merci !

• Je suis dans la lecture du tome 1 et je me régale…

• J’avance dans la lecture en continuant à me régaler !

• Quel régal ! Et quelle histoire extraordinaire ! Tu expliques de manière très vivante (et très émouvante) la façon dont tu as découvert San-Antonio, ta (très belle) première lettre à Frédéric Dard (j'imagine ce qu’il a dû ressentir à sa lecture), ta découverte du titre de “France-Soir” concernant sa tentative de suicide alors que tu partais chez lui... Bon, j’en suis seulement au tome 1 mais soyons clair : je suis déjà conquis…

• Les deux livres sont magnifiques, je me suis régalé à les lire…

• Merci pour ces précieux ouvrages Dard !

• Bravo pour ce beau et gros travail. On voit la passion à l’œuvre !

• C’est magnifique : j’ai refait un voyage en apnée avec Frédéric Dard, mon second Papa... Un grand MERCI.

• Je me lance : je n’ai pas une belle plume ni ne suis critique littéraire mais j'ai quand même acquis au cours de ma vie la totalité des œuvres de Frédéric Dard et suis en train de terminer leur relecture complète à la (dé)faveur de ce long confinement. Monsieur Hidalgo nous livre une telle somme d'informations, sur F. Dard bien sûr avec humilité et délicatesse, mais également sur la vie culturelle de cette époque, artistique, littéraire, musicale… C'est truffé d’informations et de scoops, mais l’écriture recherchée et fluide en permet la lecture aisée. J’ai beaucoup appris, croyant tout connaître et je remercie l'auteur de son partage ; comme son mentor il se livre avec sincérité et nous fait partager ses émotions. L’ouvrage a tout naturellement pris place dans ma bibliothèque à la suite de “Napoléon Pommier” et de “Céréales killer”.

• Je me régale de la saga d’art Dard, et je souhaiterais l’offrir à un ami qui possède l’intégrale de San-Antonio (moins un, le malheureux…). Or, ni sur votre site, ni sur votre blog, il n'existe de lien pour commander. Est-ce la rançon du succès ?

• Je ne comprends pas, après lecture des deux volumes, pourquoi aucun éditeur sérieux ne s’en est emparé. C’est passionnant, l’écriture nous rappelle les souvenirs de lecteurs de San-Antonio que nous étions. Enfin, l’émotion qui sous-tend le récit touche profondément le lecteur…

• Une telle somme de connaissance et de travail mérite mieux qu'une édition confidentielle, aussi luxueuse soit-elle…

• Frédéric ne s’était pas trompé en t’accordant sa confiance et son amitié pendant toutes ces années. Ses vrais amis comme toi ne sont pas si nombreux. Ton travail éditorial est époustouflant et le soin dans les détails m’a bluffée. [...] Frédéric aurait été admiratif devant une telle somme de travail. Un coup de chapeau aussi pour la mise en forme impeccable de ce livre qui a représenté un travail long et minutieux…

• J’ai lu votre ouvrage toutes affaires cessantes : c’est formidable ! À 16 ans vous aviez tout compris…

• Je l’avais mis de côté [...] et puis je l’ai ouvert, ce coffret… pour ne plus le refermer avant d’avoir revécu 50 années auprès de Frédéric grâce à toi. Je suis épuisé ! De bonne fatigue, de plaisir de lecture, au bord des larmes parfois tant j’avais l’impression d’être le seul destinataire de tes confidences (tiens, ça me rappelle quelque chose, cette façon de rendre le lecteur complice !). C’est un très beau livre d’amour à rendre jaloux les amants virtuels de San-Antonio [...]. Si j’ai retrouvé le Frédéric Dard et le San-Antonio que j'aime et goûté à ton choix d’extraits si judicieux, j’ai aussi appris plein de choses sur sa vie et celle de son entourage personnel et professionnel, quand les deux n’étaient pas confondus. [...] Quel homme de bonté, de gentillesse et de générosité et quelle aventure, quelle histoire hors du commun que la vôtre ! Tu évoques souvent ses réflexions sur la connerie, je referme ton livre sur la dernière photo, poignante, le devinant plus angoissé sur notre avenir que sur le sien. Je me sens tout con, c'est con, non ?

• Mieux que bien, et même beaucoup mieux que très bien ! Un grand livre, en somme.

• Ce livre est tellement énorme… qu’il y en a deux ! Moi aussi, j’l’ai pas finie, cette bible, mais ce que j’ai lu, je le comprends, ça vient du cœur. Du cœur de ces deux amis qu’étaient, que sont, FD et FH. Fred nous raconte son Frédéric. Bizarrement, c’est le nôtre. Fred était là, pour moi, devant San-A, à le décortiquer sans pince, une berge avant ma glorieuse naissance ! J’y crois pas, surtout quand on connaît le bel Hidalgo. Toujours fringant, top actif. Y en aura pas pour tout le monde, qu’on avait dit, et les cons comme d’habitude n’ont rien compris. Alors, ce livre je l’aime, et comme je l’aime je le dévore à feu doux, doucement, pas gâcher le plaisir ! ROMAN extraordinaire, qu’il fallait vraiment écrire... Page 200, déjà, du second tome… J’ai pas envie de le terminer !

• Je l’ai lu d'une traite ! Les deux tomes ! Et j’ai trouvé ça très bien, c’est non seulement un témoignage affectueux, mais c’est aussi une belle mise en perspective de l’importance de ce grand écrivain.

• Première escale dans cette proposition de voyage san-antoniesque. J’ai deux tablettes de chocolat (tome 1 et tome 2) et comme une bonne gourmandise je m’en garde une pour le mois prochain. Généralement la fatigue m’emporte au bout de quelques pages de lecture, mais là j’ai essayé de ne pas dévorer d’un seule bouchée cette première tablette… Merci pour ce formidable voyage qui me permet de mieux comprendre l’univers de San-Antonio (avec un tiret !) […] Après le voyage extérieur auprès de Brel [cf. “Le Voyage au bout de la vie”], je découvre celui de l’intérieur avec San-Antonio. J’y retrouve tous les ingrédients d’une œuvre d’art : l’urgence et la nécessité de lui donner une existence. Et en cadeau, la rareté de l’édition qui n’est pas pour me déplaire, me considérant comme un privilégié. Je résiste pour ne pas entamer ma seconde tablette tout de suite…

• Je viens de terminer le tome 1. Passionnant et émouvant (notamment l’épisode “yaya”…). Tu as tout compris de l’âme dardienne, spontanément, viscéralement ! Oui, Frédéric Dard a su résoudre le problème de la communication. Effectivement, le maître-mot est la connivence entre lui et son lecteur. […] J'ai appris beaucoup : la vente de peintures de Frédéric à des célébrités ; Raymond Devos, Roger Couderc lecteurs de San-Antonio ; Alain Gottvallès pressenti pour tenir le rôle de San-Antonio à l’écran ; le rappel de citations : “Les objets ne sont que des pense-gens” (tellement vrai !) ; les tourniquets du Fleuve Noir… Et l’épopée du “Petit San-Antonien” m’a régalé. Quel voyage en apnée dans la vie de San-Antonio ! Oui, Frédéric nous manque en ces temps où l'intolérance et la violence prennent le pas. Mais : “pas pleurer”… Merci beaucoup pour ce beau travail et ce bel hommage. J’attaque le tome 2 en août.

En Pour moi, c'est le grand livre du lecteur privilégié de San-Antonio que beaucoup d'entre nous aurions aimé être, et que tu as eu la chance d'avoir été. Avec notamment une plongée passionnante dans les années soixante par exemple, qui constitue aussi un témoignage de première main sur l'époque. Et c'est un roman en effet, le roman de la vie d'un grand lecteur en rapport avec le roman de la vie d'un grand auteur. Roman presque de suspense parfois, comme au moment de la quasi-rupture due à En avant la moujik... Bref, un grand bonheur de lecture.

Je n’ai pas encore terminé le tome 1. Mais je me régale à chaque fois que j’y plonge. C’est bourré d'anecdotes, de références précises, de commentaires judicieux. Je reviens vers toi quand j'aurai avalé les deux tomes pour te donner mon sentiment final, mais je peux déjà te dire que j'adore. Ton style d'écriture est vraiment agréable à lire. Et c’est fou, la chance que tu as eue – que tu as su provoquer – d'entretenir cette relation intime et chaleureuse avec Frédéric. À bientôt !

Bon, je viens de terminer le tome 01. D'abord une option 3 étoiles sur la qualité du bouquin, […] c'est du surchoix, rarement vu ces dernières années dans les parutions concernant Frédéric Dard ; surtout à ce prix : de la qualité, du beau, du vrai, du papier, de la reliure extra ! Ensuite, j'ai aimé, j'ai découvert plein de petits trucs, de précisions, surtout sur la chronologie, les voyages, etc., et le suspense… et cette fin inattendue… Je n'avais jamais envisagé cette fin-là, je pensais que […]. J’avais tort. Alors qu’est-ce que je fais ? Je recommence ma lecture, ou je pars vers le tome 02 ? De toute façon, il me faut recommencer au départ et relire, annoter, assimiler tout ça. J’en savoure la lecture… en me rationnant chaque jour pour en garder sous le pied (le pied, c’est le mot !) pendant le reste de mes vacances…

Je suis au milieu du second volume San-Antonio (t’as vu ? y a le trait d’union !), c’est magnifique et je me régale, tu peux pas savoir ! Que d’émotions ! […] Si le bonhomme bibi qui t’avait présenté à Massugas, pour ta conférence sur Brel, avec ce discours de présentation “en forme d’éloge funèbre” humoristique (comme tu t’étais plu à le dire), avait su tout ce que je viens d’apprendre, ben… il n’aurait sans doute pas osé parler ce soir-là ! Merci pour tout... et pour la dédicace.

Il voulait des avis, le Bel Hidalgo ?
Bin, j’ai pas fini.
Et sais-tu pourquoi j’ai pas fini ?
Bin, parce que j’ai pas envie que ça finisse !
Ma Félicie à moi m’a toujours conseillé d’y aller doucement avec le dessert… La voilà, ma première analyse ! Et merci !

À peine avais-je le pied (et quel pied !) posé dans le premier tome (de Savoie), que je me retrouvais en enfance. […] Merci Fred pour ce beau partage et félicitations à ta Félicie pour sa longévité et l’ardeur insatiable de son fiston à faire connaître le meilleur en toutes choses. Comme je t’envie d’avoir connu de si près cette belle personne qu’était Frédéric Dard !

Votre livre est un régal à lire ! Et les notes passionnantes : une mine !

Un seul mot : génial !

Ces réactions ne m’étonnent pas : pour tous les amoureux de Frédéric Dard, ce livre n'est pas qu’une référence, c’est LA référence ! Bien bêtes sont les éditeurs et ceux qui ne l’ont pas commandé… Tous les fans de San-Antonio rêvent d’avoir vécu ta rencontre… Mais grâce à ton talent littéraire et de conteur (tu as eu de bonnes lectures !), tu nous permets de la vivre à notre tour : c’est le plus beau cadeau que tu pouvais faire aux amis de San-Antonio. Donc, merci !


Vaut mieux lire ça que d’être sourd, aurait dit San-A. (…ou Bérurier qui aurait peut-être souhaité une joyeuse fête des paires au lecteur – voire à la lectrice ! – de ces deux tomes). Sans rire, vers la fin de l’ouvrage (écrit pour continuer à faire chorus…), j’explique que ce livre est mon « boomerang », comme un retour à l’envoyeur pour « LE » remercier de m’avoir mis le pied à l’étrier du bon côté de la vie : celui de la Bienveillance et de la Beauté (comme Berthe Bérurier, alias la Gravosse !), qui vous fait « jouer positif », sans nourrir d’illusions pour autant sur l’espèce humaine, sachant que « la chasse aux cons est un safari sans espoir ». Vos propres réactions (cf. celle de la mairie de Saint-Chef où repose l'auteur de « la plus grande épopée littéraire de l'après-guerre » : « Cet ouvrage en deux tomes fera date ! ») sont votre boomerang au Roman de San-Antonio... Merci qui ? Merci Frédéric Dard, génie de l’écriture et bon génie de ses con…temporains.

Merci à vous, enfin, pour vos commentaires spontanés (et, d'ores et déjà, pour ceux à venir, en privé ou en public, en compléments à ce propre blog – ne manquez pas de les consulter en cliquant ci-dessous sur « Voir les XX commentaires »)… En retour, permettez-moi de vous embrasser collectivement… « en attendant le plaisir » – disait-IL encore, « de le faire individuellement de vive voix » !

NB. Pour aller plus loin avec San-Antonio et ses amis, si affinités il y a, je ne saurais trop vous conseiller de demander à rejoindre dard-dard « San-Antonio / Frédéric Dard », le groupe de référence sur les réseaux sociaux (près de 12 000 membres), d’où provient une partie des commentaires de lecture ci-dessus.

*Il y a eu toutefois quelques articles d’auteurs-journalistes, dont voici des extraits :

• Indispensables ! Ces deux tomes consacrés à la saga Frédéric Dard alias San-Antonio […] sont bel et bien indispensables. Honte aux éditeurs frileux ! Concoctée loin des thébaïdes parisiennes, voici une somme documentaire et humaine digne de figurer dans la bibliothèque de tout honnête homme sachant encore conjuguer amour et partage, truculence et humour. […] Qui sait, cela a peut-être fichu les pétoches aux éditeurs au petit pied, les tristes sires qui craignent qu’on fasse une ribambelle de mioches à notre belle langue française… (Serge Dillaz)

 • Bref, le gros livre de Fred Hidalgo est indispensable car non seulement il apporte une vision un peu nouvelle de Frédéric Dard, complétant ainsi sa biographie, mais il interroge aussi indirectement l’époque dans laquelle notre auteur favori a déployé son talent, il était le plus beau symbole de cette littérature populaire qui finit par faire la peau à la littérature bourgeoise en lui imposant de nouvelles normes. Fred Hidalgo pose une question importante : Frédéric Dard pourrait-il écrire ce qu’il a écrit aujourd’hui, dans cette époque du politiquement correct qui n’est qu’une autre forme de la stérilisation de l’esprit ? (Texte complet à lire sur le blog d’Alexandre Clément).

• Avant même mai 68, San-Antonio fut, tout comme Brassens, Brel et Ferré ou encore Hara-Kiri, un ballon d'oxygène dans une France gaullienne, coincée, rétrograde. Les années 60 et suivantes se sont nourries d'une pensée libre, drôle et revigorante. Fred Hidalgo a réalisé la première biographie magistrale de Frédéric Dard/San-Antonio : un régal pour la pensée honnête !
[...] Affirmant un véritable amour pour l’humain admirable qu’était Frédéric Dard dans ses idées comme dans la vie, Fred Hidalgo relate moultes anecdotes truculentes, relève de nombreux clins d’œil du destin malicieux, analyse l’apparente dichotomie entre l’auteur de drames sidérants les plus noirs et celui de farces monumentales les plus hilarantes. On découvre comment l’auteur sérieux de C’est toi le venin, humilié par Simenon, prend sa revanche avec Béru et son vocabulaire improbable. [...] On découvre tous les pseudonymes de Frédéric Dard, tous ses livres inédits ou oubliés. Au fil des chapitres, marqués par les titres de cette œuvre considérable, on rencontre Jean Richard, Paul Préboist, Gérard Barray et aussi Georges Guétary, Renaud, Henri Tachan et tant d’autres. On plonge dans un océan d’informations, on croit couler et puis on remonte à la surface un peu plus riche dans sa tête et heureux d’avoir trouvé une île loin de nos déprimants rivages. Rien ne manque pour étancher la soif du lecteur. Cet ouvrage est le monument qui manquait au plus insolite des auteurs du XXe siècle, témoin lucide de son temps, philosophe sans le savoir, à l’écriture si jubilatoire. (Texte complet, signé Michel Trihoreau, à lire sur le site
Nos Enchanteurs.)

• […] C’est tout cela que nous dévoile Fred Hidalgo dans son passionnant ouvrage. […] Il nous livre, à travers un témoignage affectueux dont il n’a pas son pareil pour nous rendre complices à la lecture, une belle mise en perspective de l’importance de celui qui reçut le Grand prix de littérature policière des mains de Jeanne Moreau en 1957. […] Une somme d'informations extraordinaire nous est offerte sur Frédéric Dard, avec humilité et délicatesse, mais aussi sur la vie culturelle, artistique, littéraire, musicale de l’époque que nous traversons, via la lecture de plus de 800 pages issues d’une somme de travail qu’aurait admirée à coup sûr celui de qui Renaud se rapprocha beaucoup après la disparition tragique de Coluche... » (Texte complet, où l’auteur, Sébastien Lesné, relève certaines passerelles entre les livres de San-Antonio et les chansons de Georges Brassens, en cite d’autres et rappelle que « le sétois moustachu […] manifesta un intérêt certain pour les œuvres du père de San-Antonio, en bonne place dans sa bibliothèque… » sur son blog Georges Brassens, par les routes du printemps…)

[…] Autant l’avouer : avant de lire ces deux volumes, je n’avais pas beaucoup navigué dans l’univers de San-Antonio, truffé de personnages rabelaisiens, oublieux de toute langue de bois pour mieux adopter celle inventée par leur créateur. Et pourtant, j’ai dévoré sans retenue ce récit à deux voix et quatre mains. Une biographie, un recueil de souvenirs ? Bien plus que cela : la résultante passionnante d’une longue complicité affective, malgré un écart de vingt-huit ans, entre les deux Frédo. [...] La totale sur l’immense écrivain […], avec l’envie constante de découvrir la suite […]. Tout y est, oui, sur l’homme et son œuvre, sans la moindre zone d’ombre ni omission, jusqu’à la perception qu’on en a aujourd’hui. (Texte complet, signé Albert Weber, à lire sur le site Planète Francophone).

 

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