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  • : SI ÇA VOUS CHANTE (le blog de Fred Hidalgo)
  • : Parce que c’est un art populaire entre tous, qui touche à la vie de chacun et appartient à la mémoire collective, la chanson constitue le meilleur reflet de l’air du temps : via son histoire (qui « est la même que la nôtre », chantait Charles Trenet) et son actualité, ce blog destiné surtout à illustrer et promouvoir la chanson de l’espace francophone ne se fixera donc aucune limite…
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  • Fred Hidalgo
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.

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18 mai 2020 1 18 /05 /mai /2020 09:23

« À prendre ou à lécher »*… par les affranchis


L’an dernier, les amateurs du Fou Écrivant (le plus lu du XXe siècle) ont célébré les 70 ans de son héros et alter ego San-Antonio (voir « San-Antonio sans alter ego »). Cette année, la Poste rend hommage à Frédéric Dard à l’occasion des vingt ans de sa disparition, le 6 juin 2000 (voir « San-Antonio fait chorus »), mais surtout en prévision du centenaire de sa naissance en 2021. Lui qui détestait les honneurs en tout genre, mais s’est toujours considéré (non sans humour) comme un « homme de lettres », en raison de sa venue au monde au-dessus d’un bureau de poste – chez un receveur des postes ! –, sûr qu'à se voir ainsi timbré, il se serait exclamé, comme San-Antonio en 1959 : Tout le plaisir est pour moi !a
_________
*Vous me direz que les timbres d’aujourd’hui ne se collent plus avec la langue, qu’ils sont autocollants. Soit ! Avec le temps tout se perd, comme les bas à jarretelles au profit de collants d'hommes-grenouilles, pas vrai San-A. ? Ça n’est pas une raison de se priver, pour autant, d’un titre alléchant, paru en même temps que le premier numéro de Paroles et Musique...

 


Voulez-vous que je vous dise ? En cette période si glauque où nombre d’entre nous ont perdu des proches ou des amis, ça fait un bien… fou de le voir ainsi timbré, en attendant de le découvrir oblitéré ; à moi, peut-être plus qu’au premier venu, qui l’avais « reconnu » déjà, tout minot, sans même savoir qui pouvait se cacher derrière ce nom étrangement hispanisant, alors que la mode littéraire était aux pseudos anglo-saxons (dix ans avant la vague de la chanson yéyé). San-Antonio !?... Comment aurions-nous pu imaginer à l’époque, moi, en lui adressant une lettre « fondatrice », lui en m’apportant (à ma grande surprise et pour mon plus grand bonheur) une réponse inoubliable, qu’un jour – plus d’un demi-siècle après ! – il nous serait possible de correspondre en affranchissant nos lettres à son image ?!

En 1990, déjà, on s’était réjoui quand la Poste française avait émis un timbre (à 2,80 F) à l’effigie de Jacques Brel (même si le portrait choisi, dessiné par Moretti, m’avait laissé dubitatif), mais surtout j’avais été comblé en découvrant sur place qu’en 2009 la Polynésie avait choisi de mettre le Grand Jacques à la une, à l’endroit même (un « pays » autonome, je vous le rappelle, avec son propre gouvernement) de son accessible étoile où l’avait mené l’impossible rêve de sa quête ultime (voir « Le voyage au bout de la vie »). Pour seulement 100 F Pacifique !

Et voici que pour moins d’un euro, le pays de Rabelais nous offre Frédéric Dard dit San-Antonio à prendre ou à lécher !

San-Antonio enfin timbré, pas trop tôt pour ce génial écrivain dont le succès populaire (donc suspect...) lui a trop longtemps valu, de son vivant, d’être enfermé dans des limbes d’indifférence voire repoussé dans un purgatoire de condescendance, par les tenants forcenés de l’agagadémisme et de la bien-pensance.

Cela me rappelle les réactions offusquées d’amateurs purs et durs de « la bonne chanson française » qui refusaient mordicus qu’on pût aimer, par exemple, un Brel et un Goldman en même temps (…alors que le répertoire de celui-ci, soit dit en passant, est infiniment brélien dans l’inspiration). Tant pis pour ces gens-là… Il suffit à mon bonheur de savoir deux ou trois petites choses… Que San-Antonio connaissait la chanson, qu’il était même avec Brel, dans sa loge, après sa toute dernière à l’Olympia… Ou qu’à défaut d’arriver à réunir Jean-Jacques Goldman (qui l’adorait) et Frédéric Dard (qui n’en pensait pas moins à son sujet), j’avais pu leur faciliter un rendez-vous téléphonique, diffusé en direct à la radio et tenu secret jusqu’au dernier moment (voir le verbatim intégral de leur conversation dans « Goldman Confidentiel »).

Bref ! Si vous mordez entr’ les lignes le topo que j’viens d’vous bonnir, les aminches, vous savez quoi faire la prochaine fois que vous aurez des velléités épistolaires, d’amour ou d’amitié ; a fortiori si votre bafouille est destinée au « Grand Connétable de la San-Antoniaiserie » :

l’orner du portrait dentelé (99 ans et toutes ses dents) du Grand Maître de l’Ordre (des plaisantins de bonne compagnie) ! Il ne vous en coûtera que 0,97 euro et une dose gracieuse de sympathie. Quant aux pisse-froid, aux pisse-chagrin, aux aboyeurs professionnels qui trouvent toujours à redire, bien planqués à l’arrière, à critiquer ce que font les autres, aux atrophiés du bulbe auxquels l’ouverture d’esprit est aussi étrangère qu’un semblant d’intelligence aux cons (« les seuls véritables étrangers de l’existence, disait Frédéric, contre lesquels s’exerce ma xénophobie »), quant aux trépanés de la membrane empathique, amputés des glandes lacrymogènes (dixit Bérurier) à force de s’autocastrer le rire salvateur, aux empêcheurs d’aimer (qui on veut) en rond, en long, en large et en travers, qu’ils se tranquillisent : personne ne s’avisera jamais de les regretter s’ils se décident à lâcher (enfin) la rampe !

Pour rire, justement (et pour la curiosité de l’affaire), je vous offre une chanson sur San-Antonio de 1981 tirée du navet « le plus pire » qu’on ait jamais « adapté » de son œuvre inadaptable à l’écran (réalisé par Joël Séria, pourtant, vous savez : Les Galettes de Pont-Aven, avec le regretté Jean-Pierre Marielle…). Interprétée par Robert Carpentier, composée par M. Stelio et J.P. Vinit, mais surtout écrite (commise ?) par le très talentueux et très sérieux Claude Lemesle, eh oui… Mais il lui sera beaucoup pardonné pour avoir eu Jacques Brel comme dieu et n’avoir pas craint, pour autant, de s’avouer idolâtre de San-Antonio !

Rappelons que, dans la seconde moitié des années 60, Frédéric Dard s’était lui-même essayé à l’exercice, sans prétention, en écrivant les paroles de la chanson San-Antonio, enregistrée par Félix Marten (sur une musique de Philippe-Gérard), ainsi que de la ritournelle préférée de Béru, Les Matelassiers, chantée par Bourvil (sur une musique de Jo Moutet). On peut les écouter dans mon premier sujet consacré à San-A. (« fait chorus ») sur ce blog.

Enfin, pour qui voudrait ne pas mourir idiot ou inculte (du Serial Virus Killer ou de connerie assumée), voici le communiqué officiel que La Poste va diffuser dès aujourd’hui, lundi 18 mai 2020, pour accompagner la sortie de son nouveau timbre (et je n’y suis pour rien*, s’il est – forcément – élogieux !) :

« Frédéric Dard est né le 29 juin 1921, à Jallieu (Isère), à l’étage situé au-dessus d’un bureau de Poste, ce qui, disait-il, le prédestinait à une carrière dans les lettres… Issu d’une famille modeste, il manifeste très tôt un goût immodéré pour la lecture. Influencé par des auteurs comme Georges Simenon ou Louis-Ferdinand Céline, il publie son premier livre, La Peuchère, en 1940. Touche-à-tout littéraire et stakhanoviste de la machine à écrire, il se frotte, sous son nom ou sous d’improbables pseudonymes, au roman populaire comme au conte pour enfants, en passant par l’écriture théâtrale ou les adaptations radiophoniques et les scénarios pour le petit et le grand écran. En 1949, en plein épanouissement du roman noir à l’américaine, il publie Réglez-lui son compte !, premier titre d’une série de plus de 180 livres mettant en scène le commissaire San-Antonio. Cette saga deviendra un raz-de-marée littéraire, transcendant tous les lectorats. La faconde, la truculence et la vitalité rabelaisienne de son héros et de son inséparable comparse Bérurier n’ont d’égales que son génie du verbe et ses fulgurances stylistiques. À raison de quatre titres par an, Frédéric Dard a créé un personnage-pseudonyme entré au panthéon des héros populaires.
 

Phénomène unique de la littérature française du XXe siècle, Frédéric Dard a publié près de 300 livres vendus à plus de 250 millions d’exemplaires et traduits en plus de trente-cinq langues. Tant par la diversité de sa production, que par l’art unique avec lequel il a renouvelé la langue, pourfendeur de la bêtise humaine à tous les étages, il est sans conteste l’une des figures majeures du patrimoine littéraire. Homme pudique et sensible, à la personnalité attachante, Frédéric Dard est décédé le 6 juin 2000, à l’âge de 78 ans. Il repose dans le cimetière de Saint-Chef (Isère), village où il a passé une partie de son enfance.

Ce timbre, célébrant les vingt ans de sa disparition, précédera d’un an les événements autour du centenaire de sa naissance. »
*Mais Éric Bouhier, auteur de l'excellentissime Dictionnaire amoureux de San-Antonio (voir mon sujet précédent sur San-A.) y est, lui, pour tout !

___________

DERNIÈRE HEURE – Je reçois, au moment même de mettre ce sujet en ligne, une information de La Poste, faisant état – compte tenu de l’impact de la crise sanitaire et du confinement sur ses programmations du premier semestre – du report au 15 juin de l’émission du timbre dardo-san-antonien. Dont acte… qui renvoie sans coup férir cet article du genre policier à celui de l’anticipation, en le rendant carrément « scoopesque ». On nous précise aussi, pour le cas où ça vous chanterait, qu’une avant-première de ventes d’enveloppes « Premier Jour » aura lieu à Paris, les 12 et 13 juin, à la librairie Carré d’Encre. Vous voilà affranchis de A jusqu’à Z !

________
PS. Pour rappel, une bonne adresse à recommander ici et orbi : le site de l’association « Les Amis de San-Antonio » (à partir duquel vous pourrez accéder à d’autres sites, blogs, pages et groupes également des plus recommandables) ; pour y adhérer, vous pouvez vous présenter de ma part, on vous y accueillera à bras ouverts. Avec l’historique de la revue éditée par l’association, Le Monde de San-Antonio (91 numéros parus depuis 1997), véritable mine d’or pour les passionnés... et les chercheurs universitaires, de plus en plus nombreux à s'intéresser à ce monde-là.

 

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commentaires

J
Merci Fred pour ce billet savoureux, richement documenté au sujet de ce magazine "Paroles et Musique" que j'ai souvent lu avec passion . La chanson et peut être un art mineur selon Gainsbourg mais c'est un art populaire qui descend dans la rue, passe à la radio, à la télé et touche le public au cœur !
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D
Cher Fred,<br /> Je viens de lire d'une traite "La mémoire qui chante" et "Jacques Brel : Le Voyage au bout de la vie", plus le "Goldman confidentiel"...Te dire l'immense bonheur de ce voyage en mots au cœur de la chanson que tu défends si bien. Un immense merci. Tous mes voeux pour la suite sur ce chemin enchanté. <br /> Pierre Dominique Scheder.
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F
Grand plaisir d'avoir de tes nouvelles, cher Dominique... puisque c'est ton prénom d'artiste. Un artiste dont j'avais adoré le premier album, fait de poésie charmante, naïve, amusante et proche, tellement proche de nous, mais avec cette grâce particulière que seuls les vrais artistes possèdent de façon innée. Heureux d'avoir pu suivre aussi, ensuite, ton propre chemin de mots et de musiques, restés "confinés" hélas à la Suisse romande, la France n'étant guère curieuse - je parle des grands médias censés par définition être des passeurs alors qu'ils sont le plus souvent aveugles et sourds à ce qui existe au-delà des frontières de l'Hexagone, si ce n'est dans celles du monde anglo-saxon... et ne parlons même pas de nos cousins latins complètement ignorés (méprisés ?), comme on l'a vu encore tout récemment à l'occasion de la disparition du grand ACI, peintre et poète espagnol Luis Eduardo Aute. Il a fallu qu'il meure du coronavirus pour que "Le Monde" daigne enfin lui consacrer quelques lignes édifiantes, lui qui avait démarré sa carrière dans les années 60 et s'était montré l'auteur le plus subtil et créatif qui soit, obligé qu'il était de faire appel à la poésie pour contourner (et se gausser de) la censure. "Al alba" restera d'ailleurs la plus grande chanson antifranquiste de l'histoire, avec "A galopar" de Paco Ibañez et "L'Estaca" de Lluis Llach. Bon, ma passion - toujours intacte pour le partage du Beau - m'a encore entraîné plus loin que prévu. Je voulais simplement te remercier, cher Dominique, inciter ceux qui ne te connaissent pas à t'écouter, et te souhaiter également une bonne continuation à ta route enchantée... déjà longue d'une quarantaine d'années - autant que "Paroles et Musique" aujourd'hui !
A
Je ne demande que çà cher Fred , je vais me renseigner, mais je crains fort que ce soit difficile dans le contexte sanitaire actuel. Je fais mon possible quand même. J'espère que vous ne m'en voudrez pas en cas d'échec
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F
C'était de l'humour, chère Annie... et je m'en voudrais de vous faire prendre le moindre risque ! Mais qui sait, certaines personnes ne demandent qu'à succomber aux beaux yeux de certaines autres...