Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : SI ÇA VOUS CHANTE (le blog de Fred Hidalgo)
  • : Parce que c’est un art populaire entre tous, qui touche à la vie de chacun et appartient à la mémoire collective, la chanson constitue le meilleur reflet de l’air du temps : via son histoire (qui « est la même que la nôtre », chantait Charles Trenet) et son actualité, ce blog destiné surtout à illustrer et promouvoir la chanson de l’espace francophone ne se fixera donc aucune limite…
  • Contact

Profil

  • Fred Hidalgo
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.
  • Journaliste depuis 1971, créateur de plusieurs journaux dont le mensuel « Paroles et Musique » (1980-1990) et la revue « Chorus » (1992-2009). Editeur depuis 1984 et créateur en 2003 du « Département chanson » chez Fayard.

Site de Fred Hidalgo

Journaliste, éditeur, auteur
À consulter ICI

Recherche

Facebook

La Maison de la chanson vivante
   (groupe associé au blog)
 

Jean-Jacques Goldman, confidentiel
  (page dédiée au livre)

 

Fred Hidalgo
  (page personnelle)

Archives

Livres

 

 

5 mai 2010 3 05 /05 /mai /2010 09:59

Plus vite que la musique (suite)

   

Trente-troisième article de Si ça vous chante. À la grande époque du 33 tours, on était loin d’imaginer son remplacement par un disque à lecture optique. À l’arrivée de l’objet CD, le concept même de « dématérialisation » aurait paru incongru. Aujourd’hui, un blog permet d’un seul clic de faire suivre chansons et vidéos à domicile ! Mais si les outils changent, le but reste le même, toujours le même (du moins chez nous) : le partage de la découverte et du meilleur de la création. Comme le montre à nouveau cette trente-troisième fournée chansonnière. Bon appétit !

 

À vous, si ça vous chante, d’aller plus loin dans la dégustation et/ou de compléter ces appréciations par vos commentaires gustatifs de gourmets de la chanson. Des commentaires, soit dit au passage, fort appréciés de l’ensemble de nos lecteurs et en particulier des artistes dont il est question, toujours à l’affût des réactions des hôtes de ce blog aux saveurs des plats qu’ils ont amoureusement mitonnés.

   

Michèle Bernard

On a beaucoup parlé d’Anne Sylvestre ces derniers temps dans Si ça vous chante ; or, s’il est une chanteuse de la génération suivante qui pourrait revendiquer sa filiation spirituelle, c’est bien Michèle Bernard. À sa manière évidemment, Michèle Bernard possédant son propre univers qui ne ressemble à aucun autre dans la chanson actuelle – singularité qui est la marque distinctive des grands artistes. Découverte au Printemps de Bourges 1978 (époque « nouvelle chanson française » donc), la Dame à l’accordéon (à laquelle on accolait volontiers, aussi, l’étiquette de chanteuse néo-réaliste) doit en être, avec celui-ci, à son quinzième opus. Le précédent revisitait en Piano voix ses trente ans de chanson en 2008 ; son dernier album de créations originales à ce jour, Le Nez en l’air, remontant à 2006.

 

bernard-copie-1.jpg

 

Cet enregistrement propose la reprise récente avec les six voix féminines d’Évasion (groupe vocal de la région de Valence qui compte cinq albums à son actif) d’un spectacle écrit et créé en 1991. « Une variation sur le thème des frontières, des pays et des origines, écrivait Valérie Lehoux dans le dossier de Chorus n° 19 (printemps 97) consacré à Michèle Bernard : l’histoire d’un groupe de femmes déambulant dans l’Histoire. » L’entreprise était téméraire. « Pour la mener à bien, la chanteuse dépoussière de vieux hymnes patriotiques, met en musique Blaise Cendrars, Sully Prudhomme et Joachim du Bellay, écrit des titres originaux. » À sa création, la critique est unanime, le public aussi : « avec ce spectacle, Michèle Bernard finit de s’imposer comme l’une des artistes les plus originales de sa génération. » 

 

Michèle Bernard – Mes enfants

 

À l’automne 2008, pour Chorus n° 65, Michèle confiait à Michel Kemper sa décision de reprendre Des nuits noires de monde, toujours plébiscité par le public, grâce au fait d’« être proche des filles d’Évasion : on est en phase pour le revisiter. Ce sera voix, orgue de barbarie et un peu d’accordéon… Avec deux ou trois morceaux retravaillés, un nouveau et ce que les chanteuses d’Évasion, avec leur vécu, leur répertoire aussi, vont apporter elles-mêmes à cet univers. » Le résultat ? Il est là, et il est probant : des voix qui s’accordent à merveille, une belle ferveur, vingt-trois chansons dont quatorze de Michèle et, parmi les autres, un traditionnel tzigane et un portugais, un morceau en berbère et un titre en espagnol sur un poème de Miguel Hernandez. Dénominateur commun ? La chaleur humaine et son corollaire, la solidarité. Finalement Le Petit Théâtre se referme : « Musiciens, poètes / Demain d’autres fêtes / Mettront de l’or dans vos yeux / Au milieu des guerres / Ne jamais se taire / Crier la vie et adieu… »

• Michèle Bernard et Évasion : Des nuits noires de monde, 23 titres, 64’48. Prod. EPM, distr. Universal (site Internet).

    

Michel Bühler 

buhler.jpgEnregistré au Théâtre de l’Échandole, à Yverdon (Suisse), du 23 au 26 septembre dernier, avec trois musiciens aux guitares, contrebasse, accordéon et bandonéon, Voyageur retrace Les Tribulations d’un chanteur en Suisse (et ailleurs dans le monde, au Kosovo, au Sahara, au Café arabe de Jésusalem…  ou Rue de la Roquette), de son tout premier succès, Helvétiquement vôtre (1969), à plusieurs inédits de 2009. De la tendresse, de la poésie et de l’humour, que demander de plus ? La Simple histoire de quarante ans de carrière phonographique résumée en un seul album dont l’auteur (compositeur et interprète), malgré tout, malgré le temps qui passe et le monde tel qu’il est et se défait, s’efforce encore et toujours de croire en l’Homme : ouvert par une Berceuse pour un enfant qui vient, ce concert ne s’achève-t-il pas sous le signe de L’Espoir… ? Généreux et nécessaire Bubu !

 

Michel Bülher – Si le temps

 

• Michel Bühler : Voyageur – Enregistrement public, 21 titres, 75’06. Éditions du Crêt Papillon, distr. France : EPM, Suisse : Disques Office (site Internet).

 

 

Nilda Fernandez 

quichote_3.jpgJe me souviens d’un certain Daniel Fernandez, découvert à l’occasion de son 33 tours de 1981, puis sur scène au Printemps de Bourges. Je me souviens de Frédéric Dard me demandant dix ans plus tard, en tête à tête, ce que je pensais d’un certain Nilda Fernandez qui venait de sortir son premier album CD : Nos fiançailles, Madrid Madrid, Entre Lyon et Barcelone… Succès immense et apparemment fulgurant – sauf que dix ans s’étaient écoulés entre ces deux premiers albums, dix ans, le lap de temps moyen pour faire d’un débutant un véritable artiste. L’année suivante, en 1992, Nilda figurait au sommaire du premier numéro de Chorus, en « Rencontre », juste après Léo Ferré…. et avant Maurane et Richard Desjardins ! Et déjà, il confiait (à Pascale Bigot) ses doutes sur ce métier : « Toute réussite repose sur un malentendu : au-delà d’un certain nombre de disques vendus, on doit se poser des questions. Sur scène, quand j’arrive accueilli par une ovation, cela me gêne presque… »

 

Nilda.jpg

 

Un deuxième CD suivit « normalement » en 1993 : Ne me fais pas mal. En 1997, avec un superbe album sans frontières, Innu Nikamu, l’artiste commençait à dérouter son monde. Il prit alors ses distances avec le métier, ou plutôt avec ce que le métier attend d’un artiste à succès : qu’il fasse fructifier son fonds de commerce, en réutilisant les mêmes recettes. En 1999, il consacre tout un disque en espagnol, Castelar 704, à la poésie de Federico Garcia Lorca ; en 2000, telle une carte postale d’adieu, il adresse ses Hommages à la chanson française, avec un disque surprenant de reprises. Et puis plus rien, du moins discographiquement parlant, car Nilda va continuer de mener sa vie d’artiste de scène mais le plus souvent à l’étranger, en Amérique latine, en Russie où il s’installe, où il devient une vedette, où il crée même un festival itinérant ; sans oublier de rentrer en France, discrètement, le temps d’un concert ou deux. « Je crois en l’organisation du hasard, dit-il aujourd’hui. Ma vie est difficile à lire parce que, de l’extérieur, on ne sait pas forcément à quoi elle obéit. »

   

 

Enfin, l’automne dernier, Nilda retourne en studio pour nous donner de ses nouvelles. Après quatre mois de travail à Gênes, avec des musiciens italiens, il regagne Paris pour enregistrer sa voix (et les accordéons de Marcel Azzola et de Lionel Suarez) : « C’est difficile d’enregistrer ma voix quand on ne comprend pas mes textes… » Dix ans d’attente donc ! Pour douze chansons en forme d’autobiographie. De son « départ » (« Le monde est en délire et moi je me tire / C’est une façon d’être en avance », chante-t-il rétrospectivement dans Plus loin de ta rue, une merveille de chanson d’amour, avec refrain en espagnol et guitare flamenca) à son « retour », avec le titre qui ouvre l’album (un tube assuré pour peu que les médias veuillent bien le diffuser) : « Plages de l’Atlantique / Ou falaises de la mer Baltique / Je reviendrai sûrement un jour / Je reviendrai place de la Concorde / Ou de la révolution d’Octobre… » 

 

Nilda Fernandez – Où tu habites

   

Nilda ? Un artiste majuscule, un maître ès-mélodie, un chant vibrant grâce auquel on croit tout ce qui est dit, écrit, décrit, raconté. Comme Je lui raconte, justement. Comme Berceuse (« Pendant que dans le monde / Y a des gens qui se lèvent / Y a des gens qui se couchent sous les bombes… »). Comme Si tu me perds (« On devrait pas se laisser mourir / Tant qu’on s’est pas tout dit / Mourir, mourir et sans prévenir / C’est pas d’l’amour d’ami »). Comme Où tu habites, constat de l’absence divine avec chœurs en anglais (« À force de ne pas comprendre où tu es, où tu habites / Je finirai par me pendre / Alors réponds-moi vite, réponds-moi vite »). Comme Le monde est ce qu’il est (« …Et t’aurais tort de dire / Qu’il est laid »)… Voulez-vous que je vous dise ? J’aime tellement ce disque, ou plutôt ce disque est tellement beau – paroles et musiques, chant et orchestrations (d’une richesse et d’une subtilité rares) – que je me sens paralysé à l’idée d’en parler seulement en quelques lignes. Dans l’idéal, il y faudrait l’équivalent de ce dossier de Chorus, que nous avions prévu de consacrer à Nilda Fernandez à l’occasion, justement, de cet album. Alors, dites-vous simplement qu’un « Quichotte » de Si ça vous chante, non seulement ça se mérite mais, surtout en l’occurrence, que ça ne se discute pas !

• Nilda Fernandez : éponyme, 12 titres, 38’10. Prod. N. Fernandez, distr. Harmonia Mundi (site Internet).

   

Lokua Kanza  

Un moment de répit dans ce monde de brutes, c’est ce que nous propose Lokua Kanza. Et bon Dieu – c’est le cas de le dire, puisque dans sa langue maternelle, le lingala, le titre de ce septième opus (inclus un CD collectif avec Gérald Toto et Richard Bona en 2004) signifie « L’Éternel » – quel bien fou cela fait ! Retour aux sources pour ce natif de l’ex-Zaïre (« Je suis né à Bukavu en 1958, d’une mère rwandaise tutsi et d’un père congolais mongo. Mais c’est à Kinshasa, où mes parents se sont installés en 1964, que j’ai grandi »), après un album entièrement en français dans le texte, Plus vivant, en 2005 (le premier datait de 1993). L’artiste précisait alors à Jean Théfaine (cf. Chorus 52, Rencontre) que son but n’était pas de devenir « un chanteur de variétés françaises, c’est de me faire comprendre du plus grand nombre. En Afrique, où je voyage beaucoup, je rencontre quantité de gens qui sont noirs de peau comme moi, qui ne parlent pas ma langue et qui viennent me trouver : “Monsieur Lokua, on aime ce que vous faites… mais on ne comprend pas ce que vous dites. Ce qui est hallucinant, c’est que du matin au soir, je parle en français avec tous ces gens ! C’est quoi cette relation entre le parler et le chanter ? Il y a une sorte de tabou monstrueux… »

 

kanza.jpg

 

Retour aux sources, car cette fois, c’est le tabou de l’artiste africain chantant en français qui allait frapper : Plus vivant n’a pas été accepté par les tenants de l’orthodoxie la plus obtuse. Comme si un artiste devait emprunter à vie les rails normalisés que le « métier » a posés devant lui une fois pour toutes. Retour aux sources donc, à la limpidité originelle avec ce disque en lingala… et en portugais pour une chanson en duo, car entre-temps Lokua Kanza, fâché de ces malentendus (!), s’est installé au Brésil où Nkolo a été partiellement enregistré (à Rio de Janeiro, ainsi qu’à Paris et Kinshasa). Il en reste le meilleur de l’artiste : sa voix exceptionnelle, ses talents de mélodiste et de musicien, pour continuer de célébrer – comme le notait Jean Théfaine et comme permettent de le vérifier les traductions du livret – « une Afrique tout en douceurs et en suspensions ». Avec l’ambiance du village paternel notamment, mais aussi l’absurdité des guerres tribales, la problématique de l’exil… ou encore « le cri d’un homme qui, accablé par le poids de la vie, s’en remet à Dieu » (Nkolo).

 

Lokua Kanza – Nkolo

 

La morale de l’ensemble ? « Une façon d’être et un état d’âme zen. » Une chanson l’incarne à elle seule, c’est Famille : « Quand tu es en vie / Dis aux tiens que tu les aimes avant de mourir / Montre-leur comme tu les aimes / Dis-leur que tu les aimes… » Avec ce nouvel album, aux sonorités musicales (ondes martenot, piano, flûtes, percussions, clochettes, contrebasse, harmonica, chœurs… et la participation de Sylvain Luc à la guitare) au diapason de la voix de velours de Lokua, l’artiste nous convie dans sa maison d’amour. (À voir à Paris, à l’Européen, ces 6 et 7 mai.)

• Lokua Kanza : Nkolo, 12 titres, 42’25. Prod. L. Kanza/World Village, distr. Harmonia Mundi (site Internet).

   

Zed van Traumat  

van-Traumat.jpgAttention, découverte ! Nous l’avions repéré il y a déjà quelque temps, d’abord au sein du groupe Traumat & Triogolo, au hasard ensuite de ses nombreuses premières parties (de Katerine, Émily Loizeau, Bertrand Belin, Thomas Fersen, Diterzi, Nicolas Jules, Berry, Higelin…) ; découverte confirmée en 2009 à l’écoute d’un premier album autoproduit. Nous l’avions même programmé au sommaire du n° 69 mort-né de Chorus… Depuis, Zed van Traumat, Charentais bon teint comme ne l’indique pas son nom, a fait du chemin, jusqu’à remporter récemment le prix du « Centre des écritures de la chanson » décerné par l’association Voix du Sud organisatrice des Rencontres d’Astaffort. Du coup, Francis Cabrel lui a proposé de le prendre en licence dans son label Cargo/Chandelle et c’est donc sous cette étiquette, avec une distribution nationale, que vient de (re)paraître, le 29 mars dernier, ce Belge andalou qui joue de l’humour pince-sans-rire, à l’image de ce titre où une belgitude fantasmée se marie avec d’imaginaires racines hispaniques. Car ZVT est prêt à tout… sauf à être ce Chanteur français de variétés, insipide et incolore, dont il brosse le portrait : « Chanteur français / Chanteur sans frais / Brasser du vent / Tout simplement / Se contenter / De dire je t’aime / Tout en vivant bourgeoisement / Des revenus de la Sacem… »

 

Zed van Traumat – Vous autoriserez-vous

 

On l’a compris, ZVT n’a pas sa langue dans sa poche, ses références à lui lorgnant plutôt du côté de Brel et de Gainsbourg, de Trenet ou de Nougaro, même s’il s’applique à chanter sans un mot plus haut que l’autre. C’est piquant, provocateur, ça peut être tendre ou cruel et même érotique (Vous autoriserez-vous ?), comme un antidote au cynisme ambiant, mais ça ne se prend jamais au sérieux. Musicalement, c’est feutré, la voix en avant dans une ambiance jazz (guitares, sax, batterie et contrebasse, avec quelques notes de-ci de-là d’accordéon, de trompette, de bugle, de violoncelle ou d’orgue Hammond) qui ne dédaigne pas les incursions dans les musiques de genres, tango ou blues par exemple. Sur scène, note avec justesse le communiqué de presse, « cet échalas trentenaire au verbe aiguisé comme la lame du matador s’impose comme le poète de nos vicissitudes ordinaires », une sorte de Boris Vian d’aujourd’hui : c’est d’autant mieux vu que Zed van Traumat avertit lui-même qu’il pratique la chanson comme d’autres la tauromachie. Olé !

• Zed van Traumat : Belge andalou, 12 titres, 48’31. Chandelle Productions, distr. Sony Music (site Internet). 

 

 

Partager cet article
Repost0
4 mai 2010 2 04 /05 /mai /2010 08:46

Des « années Paroles et Musique »

 

aux « lendemains qui chantent »

 

   

Les nouveautés vont plus vite que la musique… et que Si ça vous chante. Alors, voici sans plus tarder – après les sorties de l’automne et de l’hiver (voir les différents articles de la rubrique « Actu Disques et DVD ») – une première sélection printanière d’une nouvelle série de critiques. Consacrées à la fois aux artistes des « Années Paroles et Musique » (les décennies 70-80), aux représentants de la « Génération Chorus » (années 90-2000) et aux talents en herbe qui nous promettent des « Lendemains qui chantent », brassant indistinctement (et volontairement) les genres musicaux, elles n’obéissent ici qu’à un seul ordre, l’ordre alphabétique.

 

À vous, amis lecteurs et lectrices, de faire le bout de chemin complémentaire qui peut et doit – si ça vous chante – vous apporter tout plein de petits bonheurs, à l’aide du site de chaque artiste et/ou d’une chanson audio ou vidéo extraite de son disque. Précision : ces nouveautés peuvent très bien concerner des albums de plusieurs mois d’âge. Contrairement à ce que laisse croire la société du spectacle qui vit à flux toujours tendu – un produit chassant aussitôt le précédent –, une œuvre artistique, qui a souvent demandé des années de travail à son auteur, n’est pas frappée de péremption au bout de quelques semaines. C’est même le temps qui, en apportant le recul nécessaire, vous permet de mieux apprécier l’œuvre en question ; c’est le temps aussi qui bonifie (éventuellement) celle-ci aux yeux et aux oreilles de tous.  

Voilà. Ça vous chante ? Alors, c’est parti. De A jusqu’à Z… comme le nouvel album de Michel Arbatz. Avec par-ci par-là un « Quichotte » pour distinguer et incarner le meilleur du meilleur... à l’instar de ce premier disque pour démarrer vite et fort.  

 

Michel Arbatz 

quichote_3.jpgSon premier album date de 1975. Le précédent, Retrouver le Sud, de 2007. « Chanson, poésie, théâtre, stages, livres et disques : discret mais hyperactif, Michel Arbatz est souvent là où on ne l’attend pas. De Charlie Mingus à Robert Desnos, d’Armand Gatti à Leonard Cohen, l’homme n’oublie rien de ses passions artistiques » (J. Vassal, cf. Chorus n° 60). Avec ce dixième opus, ce jongleur de mots souvent jubilatoire (on pourrait ajouter Brassens, Boby Lapointe et Nougaro à ses références) n’est pas loin de son apogée créatrice. « J’ai écrit ces chansons, dit-il, sans penser à rien revendiquer, qu’à dire quelques petits bobos qui m’encombrent, comme le départ des abeilles, les lointaines banlieues, le sabre qui fend Jérusalem et un certain retour d’obscurantisme. Qu’on pardonne mon envie de mordre, nous avons souvent le plaisir du chant malgré le monde. J’ai partagé ce plaisir avec Olivier-Roman Garcia, mon frère de scène. Il a, malgré son jeune âge, la gaieté de qui est allé au fond des choses et en est revenu rassuré, comme dit Romain Gary… Et comme rien ne vaut le pain qu’on fait à la maison, nous avons réalisé cet album de A à Z avec notre grain et nos rêves d’artisans. »

 

arbatz.jpg

 

Musicalement, le jazz, le flamenco, le rap, la saudade et autres ingrédients épiçant la chanson française (bandonéon, oud, sanza, percussions, accordéon, violoncelle, guitares, mandoline, basse…) alternent ou s’épousent pour le meilleur et le sourire, la tendresse et l’ironie. Des franquistes canonisés en groupe par Benoît XVI à l’histoire de la Vénus hottentote, le constat n’est jamais amer mais lucide en diable. Comme la morale d’un Piaf de music-hall : « J’ai fréquenté des condors / Mais j’étais pas pigeon et j’étais pas rapace / Dans c’métier si tu t’endors / Tu t’fais bouffer tout cru si t’as pas d’carapace… » Mais « Te fais pas de souci / Y a toujours du mouron / Pour les petits oiseaux ! » 

 

Michel Arbatz – La Vénus du Cap

 

• Michel Arbatz : De A à Z, 14 titres, 50’56. Prod Babel-Zigzags, distr. Mosaic Music (site Internet).

   

Morice Benin 

benin.jpgS’il s’agissait d’un autre artiste, plus dans la norme, on pourrait parler de quarante ans de « carrière », née dans le sillage de Mai 68, avec un premier album, Peut-être, sorti d’emblée en autoproduction (ou plutôt en autogestion) en 1973. Mais Morice Benin, qui n’est pas dans la marge pour autant, se produisant régulièrement sur scène et sortant non moins régulièrement des albums (celui-ci est son trentième, sans parler de ses créations pour le jeune public !), aura vécu sa vie d’auteur, de compositeur et d’interprète en dehors de tous les canons du « métier ». Une voix vibrante, douce et lyrique, une écriture fluide, un sens de la mélodie (arrangements et toutes parties musicales – claviers et cordes – de Patrick Leroux) et une soif inextinguible « d’autre chose » : « Nous n’avons que trop espéré / Le miracle du grand soir / D’être soumis nous a livrés / Au Minotaure dans les miroirs / Nous avons soif d’autre chose / D’un soupçon d’amour, d’une pause… »

  

Morice Benin – La Tendresse

 

Les titres de ses chansons parlent d’eux-mêmes : L’Élan, Le Sursaut, Vie sacrée, Soif, Guetteur, In vitro (« Nous étions tous des Don Quichotte / Chargés d’entretenir le feu / Mais par une étrange alchimie / Le sablier s’est inversé »)… Quinze chansons – dont une, sublime, du trop méconnu Bruno Ruiz, Des forces (« Comme des soleils tatoués / Sur des plaies jamais refermées… ») – et une reprise signée Noël Roux et Hubert Giraud en 1966, offerte ici en bonus mais surtout en forme de synthèse : « On peut vivre sans la gloire qui ne prouve rien / Être inconnu dans l’histoire et s’en trouver bien / Mais vivre sans tendresse, il n’en est pas question / Non, non, non, non, il n’en est pas question… » Benin et Bourvil, même combat humaniste.

• Morice Benin : L’Élan, 16 titres, 48’41. Production Diffusion Mosaic Music (sites Internet et Myspace).

   

Jacques Higelin 

quichote_3.jpgMême s’il avait enchanté Trenet dans l’intervalle, on avait dû attendre huit ans entre Paradis païen (1998) et son dernier album de créations originales, Amor doloroso (2006), réalisé avec et chez Rodolphe Burger (ex-Kat Onoma), en Alsace. Trois ans seulement ont suffi cette fois pour que Jacques Higelin fasse rebelotte avec Rodolphe (et Dominique Mahut) à la réalisation. Et cet album enregistré comme un « live », à l’aide d’une bande d’excellents musiciens (dont ceux d’une section de cuivres), ne saurait mieux porter son nom : ce Coup de foudre atteint sa cible en nous faisant non seulement retrouver le meilleur Higelin, mais en fusionnant en outre les couleurs de sa riche palette. 

   

 

Il opère en effet la fonction entre toutes ses périodes (des Chansons d’avant le déluge à Champagne pour tout le monde en passant par Irradié, Alertez les bébés ou encore , époque Bercy 86), tous les genres musicaux qu’il a abordés et su adapter (et homogénéiser !) à sa personnalité jusqu’à en faire un registre à nul autre pareil, sa marque de fabrique. Entre rock, musiques noires, folksong, chanson d’auteur et mélodies sautillantes ou tendres (avec des titres pour la plupart de quatre à sept minutes), on ressort de son écoute le cœur en joie. 

 

higelin.jpg 

À noter une reprise on ne peut plus de circonstance de sa chanson de 1976, Aujourd’hui la crise : « C’est dur aujourd’hui peut-être / Demain, ça s’ra vachement mieux… » À laquelle fait drôlement écho une Valse MF (« C’est la fin des asticots / Y a trop de gens sur le carreau… / Ça s’arrangera pas d’sitôt / Va falloir montrer les crocs / Avant qu’ils nous serrent la laisse / Autour du garrot »). En attendant ces fameux lendemains qui chantent ou la fin des haricots (la faim des asticots ?), frère Jacques (cher « Jacquot de Pantin »), tu nous enchantes toujours autant, et nous, on t’aime toujours plus ! 

 

 

• Jacques Higelin : Coup de foudre, 12 titres, 52’53. Prod. Capitol/EMI (site Internet)

   

Karimouche 

Karimouche.jpgJ’ai dit tout le bien que je pensais de Karimouche à l’occasion de la dernière édition, en octobre 2009, des Musicales de Bastia (lire, écouter et voir Le Joli Fil), où cette jeune femme qui a fait ses premières armes dans l’ex-capitale des Gaules avait été distinguée à l’unanimité par le jury du prix des Découvertes que je présidais. « Une gouaille mi-banlieue mi-Audiard, des sentiments qui n’ont pas froid aux yeux, des mots qui bousculent les mollesses du quotidien, une autodérision délirante… » L’intéressée nous avait d’ailleurs annoncé la signature de ce premier album chez Atmosphériques, label (indépendant) de qualité s’il en est qui a parié au départ sur Louise Attaque, Abd Al Malik, Les Wriggles et autres Joseph d’Anvers. Je n’en rajouterais donc pas, sinon pour préciser que Karimouche ne fait pas « de la chanson moraliste », préférant « raconter des histoires, l’écriture cash, les mots simples, les situations très imagées, comme des courts métrages ». Si elle adore Fréhel et Piaf, elle ne s’inscrit pas dans ce registre de chanson réaliste : « Dès que j’essaie le truc joli ou un refrain poétique, ça part dans l’humour. » Dont acte, sachant toutefois que l’humour « donne le courage de jouer tout ce qu’on ne peut pas assumer à visage découvert… » 

   

 

Au plan musical, cet Emballage d’origine – mélange « de choses chantées, d’autres slammées, rappées… », d’une façon toujours enjouée – recouvre un bien beau paquet-cadeau empli de claviers (Jean-Pierre Caporossi qui l’accompagne sur scène et Julien Costa qui signe les arrangements), de guitares, de violon, d’accordéon, de tablas… et bien sûr de l’Human Beat Box (alias Kosh) qui complète sa « formation » actuelle de scène. N’en doutez pas : Carima Amarouche, alias Karimouche, touche les fidèles de chanson et ceux qui n’en écoutent pas, les fous des musiques urbaines et ceux qui n’en écoutent pas. Border line, comme on dit aujourd’hui. Écoutez donc son Firmin du boulevard Clichy : mine de rien, on n’est pas loin, dans l’inspiration, de chez Fréhel…

Karimouche : Emballage d’origine, 10 titres, 37’03. Prod. Atmosphériques, distr. Pias (site Myspace).

    

La Blanche  

laBlanche.jpgAprès Michel Rocard, autoproduit de 2002 en « hommage » à l’initiateur du RMI, puis l’autoproclamé  Disque d’or de 2006 (avec l’iconoclaste La Mort à Johnny : « Aujourd’hui ça n’va pas fort / Car aujourd’hui Johnny est mort / Ça n’va pas fort aujourd’hui / C’est la faute à la mort à Johnny »), cet Imbécile heureux est le troisième album d’Éric La Blanche, ACI originaire de Lyon (encore Lyon, décidément, quel vivier de talents !). « Des chansons gaies en forme de nouvelles, d’autres un peu cruelles, d’autres encore carrément noires », annonce l’artiste qui parle aussi de « comédie du bonheur ». L’album tout entier apparaît en effet comme un exorcisme de ce monde qui part à vau-l’eau… 

 

La Blanche – Effondrement

 

Les musiques (claviers, cordes, percussions, batterie et cuivres arrangés par Nicolas Deutsch) jouent parfois la contradiction avec le verbe, parfois l’accompagnent, mais ne servent pas d’illustrations. « Elles suggèrent et évoquent sans jamais souligner, précise Éric. Sur certaines chansons, la musique louche vers l’Ouest, le grand, le large, et l’ouest du Sud, entre Amérique et Amériques, là où un cow-boy croise un mariachi et joue avec lui avant de le flinguer parce qu’il a passé la frontière. Sur d’autres, elle scrute une Europe en grisaille, où villes et banlieues semblent s’abandonner à la solitude… » La Blanche ? Noir c’est noir. Et lorsque tout a l’air rose, c’est simplement que le malheur se repose... en attendant le grand effondrement. On comprend mieux, à un tel degré de lucidité, la volonté d’être un imbécile heureux.

• La Blanche : Imbécile heureux, 10 titres, 34’36. Prod. L’Immaculée, distr. L’Autre Distribution (site Internet http://www.lablanche.org).

 

(À SUIVRE…)  

 

 
Partager cet article
Repost0
27 avril 2010 2 27 /04 /avril /2010 09:20

Le désir d’être et renaître…

 

N’attends donc pas d’être plus là
Pour me raconter tout cela
Depuis jamais qu’on se le dit
Les années passent sans merci
N’attends donc pas d’être plus ici
Pour me raconter tout ceci

(Christian Olivier, Non-dits, duo avec Olivia Ruiz, 2005)

Ce soir-là, en écoutant chanter Olivia Ruiz, quasiment à domicile, je pensais à ma première rencontre avec Anne Sylvestre, chez elle, trois décennies plus tôt presque jour pour jour, pour le n° 1 de Paroles et Musique. Et du haut de ces gradins où nous nous trouvions, ma Brune et moi, je me disais : cette fois, c’est fait, trente ans de chanson nous contemplent. Le fil d’une vie…

   

Je suis le funambule et j’aborde mon fil
Je le connais par cœur mais ce n’est pas facile
Je suis toujours fragile et puis la terre est basse
Je pense que mon fil se pourrait bien qu’il casse
[…] Mais je marche pourtant
Je marche lentement
Je ne veux pas penser
Qu’on me ferait tomber
Pour rien, pour voir, sans méchanceté
Ce n’est pas méchant de souffler
De s’amuser
à balancer
Le fil de ma vie, le fil de ma vie

(Anne Sylvestre, Sur un fil, 1981)

Le hasard fait bien les choses. En route pour l’Espagne (« le pays des ancêtres », me rappelle régulièrement Serge Llado), étape à Argelès-sur-Mer où Olivia Ruiz est annoncée en concert. Aujourd’hui jolie cité balnéaire, Argelès reste chargée du souvenir tragique des républicains espagnols qui, après avoir traversé à pied les Pyrénées enneigées, en février 1939, se virent entassés ici et dans d’autres villages de la côte, manu militari, sur des plages cernées de barbelés, surmontées de miradors, où l’on mourait de froid, de soif et de faim, enterré par ses camarades dans le sable. Camps de concentration de la honte... bel et bien français, ceux-là. Mais c’est une autre histoire, vieille histoire déjà… même si Olivia, justement, la connaît bien, avec des racines de part et d’autre de ces mêmes Pyrénées. Cali aussi, et pour cause, ses grands-parents paternels Giuseppe et Maria s’étant connus à Barcelone, pendant la guerre civile, avant d’« atterrir » sur les plages de Saint-Cyprien et d’Argelès-sur-Mer – « dans des camps de réfugiés où ils étaient accueillis comme des chiens. Ils n’avaient pas le droit de boire de l’eau, ils se faisaient tirer dessus s’ils essayaient de sortir pour en chercher… » (Cali à Jacques Vassal pour son dossier de Chorus n° 63) – puis de s’installer à deux pas de la frontière, sur les hauteurs de Vernet-les-Bains.

Ce soir-là, samedi 27 mars (Olivia a obtenu il y a peu la Victoire de la Musique de la meilleure chanteuse de l’année), il fait froid sur le littoral méditerranéen. La tramontane souffle avec violence, à moins que ce ne soient les « entrées maritimes » ? La foule s’agglutine néanmoins autour de cette espèce de palais omnisports dont l’acoustique va s’avérer incertaine. Qu’importe, pas question ici de manquer la venue de « la petite », auréolée d’une gloire qui rejaillit sur ces contrées où elle se frotta, jeunette, à toutes sortes de publics avec un répertoire puisé notamment dans le patrimoine de la chanson française. Cette « petite » à qui j’avais envoyé aussitôt, dès la fin de l’été 2003, un courriel personnel à l’écoute de son premier « pré-CD », J’aime pas l’amour, pour lui dire mon coup de cœur (je ne savais même pas, étant définitivement rétif à ce genre de piège à gogos, qu’elle était passée fugacement par une émission de téléréalité) et qu’elle pouvait compter sur Chorus pour la suivre fidèlement sur le chemin qu’elle s’était délibérément tracé, dans le sillage apparent d’une certaine Juliette.

Suivront un « Portrait » (avec photo pleine page d’ouverture de la rubrique « À suivre ») au printemps 2004 (n° 47), une place au « Top 15 » des principales révélations de notre spécial 15 ans (n° 60, été 2007), un Cœur Chorus pour son troisième album studio, Miss Météores (printemps 2009), puis, grillant l’étape traditionnelle de la « Rencontre » de cinq pages, un dossier qui lui vaut de s’afficher à la Une de la revue. Du n° 68 de la revue. Le tout dernier, l’ultime numéro des « Cahiers de la chanson ». Rien que pour cela, on aura toujours une pointe de tendresse particulière pour l’Olivia de la chanson française, Blanc par son père, Ruiz par la mère de celui-ci. Mais cela ne voudrait pas dire grand-chose sans le talent inné de la demoiselle, conforté par des années de travail, de cours de danse, de groupes de rock et autres… 

 

Chorus68.jpg

   

Il faut dire que notre belle brune, née le tout premier jour du mois de janvier 1980 à Carcassonne, a de qui tenir avec un père musicien et chanteur. Les années 80 commençaient fort pour Didier Blanc… et Paroles et Musique à la fois, « le mensuel de la chanson vivante » (« C’était un magazine formidable, me dira-t-il après le spectacle d’Olivia pendant que celle-ci converse avec Mauricette, ma brune à moi ; j’y étais abonné, forcément ! »). Dès le milieu de la décennie suivante, celle de la « Génération Chorus », auront lieu les premiers balbutiements scéniques d’Olivia Blanc : Carcassonne, Narbonne, Montpellier… entre autres dans les concerts de Block H., groupe de rock tendance Thiéfaine.  

Retour d’ascenseur ce 27 mars : Block H., dont la destinée est restée régionale, est en première partie argelésienne d’Olivia ! Clin d’œil, émotion des intéressés, en particulier du chanteur Alain Milani (celui-là même qui a écrit La Fille du vent sur l’album La Femme chocolat). Pas la mémoire courte, la petite... Salle archicomble, évidemment. Une tribune latérale, côté gauche de la scène, et tout le monde debout, joyeux, dans la fosse. Sur le mur d’en face, un immense portrait dessiné de Cali, le véritable régional de l’étape. Car ici, on est sang pour sang catalan. À Carcassonne, on n’est plus qu’occitan... Il est vrai qu’entre-temps Olivia s’est rapprochée du Roussillon en rejoignant sa famille à Narbonne, patrie (catalane !) de Charles Trenet.  

Sa prestation actuelle est on ne peut plus maîtrisée, d’énergie, de charme et de tendresse mêlés, la voix souple et sûre, la présence affirmée dans sa jolie robe andalouse aux parements rouges dont elle joue élégamment. C’est que « la petite », mine de rien, compte déjà une quinzaine d’années de bouteille ! Mais son concert d’Argelès (qui lui donne « l’impression de chanter à la maison ») est plus que cela, c’est un cadeau offert aux siens, avec des « bonus » sinon inattendus en tout cas uniques. Par chance – car aucune médiatisation particulière n’est venue pointer cette soirée pas comme les autres – Si ça vous chante était là pour immortaliser l’événement auprès de tous les amateurs de chanson francophone.  

 

olivia

(Ph. Francis Vernhet) 

 

Non, ce n’est pas un concert comme les autres, confirme rapidement Olivia au public ravi. « Je suis très émue. D’abord parce que mes grands-parents sont présents dans la salle (en fait, à côté de nous, installés sur les gradins), ensuite parce que sans le monsieur qui gère ma carrière depuis quelques années, et qui est originaire d’ici, car c’est un Catalan, je ne serais pas là où j’en suis aujourd’hui… » On pense évidemment aux récentes Victoires de la Musique, mais surtout aux salles partout pleines à craquer. « C’est grâce à monsieur Bruno Buzan, grâce à ce monsieur que vous voyez là… » Ce disant, un projecteur se braque sur une affiche de chanteur, à côté du poster de Cali : elle représente Bruno Buzan, l’homme de l’ombre ! Citoyen de Vernet-les-Bains, un peu plus haut sur la route d’Andorre, au pied du Canigou, et ami d’enfance d’un certain Cali dont il gère également la carrière – signe réciproque d’une confiance et d’une fidélité bien rares dans ce milieu. « Je ne m’attendais pas à ça, nous confiera-t-il, ému lui aussi, en fin de soirée, mais ils m’ont fait bien rire, Olivia et les autres, avec cette affiche de faux chanteur ! » 

Ses grands-parents, son manager catalan, le groupe régional… Il y aura d’autres clins d’œil sympathiques d’Olivia au milieu de chansons tour à tour tendres, lascives et survoltées, habillées de superbes couleurs instrumentales, du rock à la ballade, par des musiciens totalement impliqués dans l’histoire partagée sur scène (dont l’accordéoniste-choriste Cecile Marques, de retour elle aussi « à la maison ») et avec le public. Celui-ci est aux anges d’avoir son Olivia rien que pour lui. Elle parle de ses débuts dans la région, rappelle que Block H. l’accueillait jadis en première partie de ses concerts et dit sa joie d’avoir pu lui rendre la pareille ce soir.

Et puis, première surprise, elle appelle son père, venu de Narbonne en famille. Et comme Didier Blanc est un excellent chanteur, vraiment (on pourra d’ailleurs en juger très bientôt, puisqu’en mai, m’a-t-il annoncé, doit sortir son premier album !), c’est un bonheur que de les écouter reprendre en duo le Bidonville de Nougaro, « un très grand monsieur de la chanson », dans une belle orchestration. Il faut dire que l’an dernier, pour célébrer le chantre de Toulouse qui aurait eu 80 ans le 09/09/09, Didier et Olivia se sont investis dans une création spéciale, Planète Nougaro (voir Chorus n° 68, « L’Année Nougaro »), à l’initiative d’Hélène Nougaro. « J’ai adoré ça, me racontera-t-il après le spectacle. C’était génial, avec Zebda, Yvan Cujious… Une belle aventure. » Leurs voix, dont ils font ce qu’ils veulent, tout aussi « blindées » l’une que l’autre bien que de tonalités différentes (plutôt classique chez l’un, l’accent faubourien, à la Arletty, chez l’autre), s’épousent et se complètent à merveille. Tel père, telle fille, chacun avec sa personnalité.  

 

olivia pere

Didier et Olivia (ph. DR) 

 

C’est reparti. La chanteuse virevolte avec grâce dans sa belle robe flamenca. La voix, le charisme, cette petite bonne femme est une grande de scène. Une chanson s’achève. Olivia interrompt à nouveau le cours normal de sa prestation. Nouvelle surprise : « Il y a là un ami, en coulisses, que vous connaissez bien aussi, qui voulait absolument être là ce soir… Surtout qu’il est ici chez lui ! » Pourquoi se priver quand on peut se donner de la joie, n’est-ce pas Charles ? Et voilà Cali, évidemment, qui déboule sur scène et invite Olivia, comme sur son album L’Espoir, à chanter avec lui Je ne te reconnais plus. Ces deux-là sont faits pour s’entendre, complices de longue date. Il ne manquait plus que Mathias Malzieu, si proche collaborateur d’Olivia (et leader de Dionysos), pour que la fête soit totale. On ne peut pas tout avoir. Mais on retrouvera Cali avec toute la « troupe », Didier Blanc et Block H. inclus, pour un beau final. 

Rare émotion au préalable avec le second duo père-fille (après que celle-ci eut superbement repris le fameux standard américain My Heart Belongs to Daddy – Mon cœur appartient à papa…) sur la chanson en espagnol consacrée à la grand-mère d’Olivia, mère de Didier, Quédate (Reste). En substance : « Reste avec moi, grand-mère / Nous avons besoin de ton sourire / Ne nous laisse pas seuls rien qu’avec le souvenir / Quel chemin suivre si le tient se meurt ? / Reste avec moi, grand-mère, ne laisse pas s’éteindre la lumière de notre histoire / Reste ! L’olivier est éternel… »). Émotion suscitée directement par la chanson, bien sûr, par sa force de persuasion, sa mélodie et son entrain orchestral ; mais décuplée ici par le fait que l’intéressée, Rita, était présente dans la salle…

Non, rien de rien, on ne regrettera rien de notre étape d’Argelès ! Ni l’avant ni l’après, ni le spectacle ni l’« after », comme on dit maintenant en français moderne dans les grands festivals francophones (un pot, quoi !), concocté pour les parents, amis et officiels dans un restaurant proche de la salle. Olivia arrive seule à pied, naturelle, simple, souriante… et disponible (il est plus de minuit) pour les photos et les autographes comme rarement je l’ai vu après un concert d’une telle intensité. « Quel dommage que Chorus ait disparu, et d’une façon aussi brutale ! déplore-t-elle spontanément auprès de Mauricette. C’était une revue fabuleuse pour la chanson. Elle nous manque énormément. Merci encore, en tout cas, pour le dossier que vous m’avez consacrée… »  

De mon côté, je rappelle à son père que si la ligne de vie chorusienne a été tranchée net entre deux saisons, au moins sa destinée aura pris fin avec une bien belle artiste de la relève en Une, parfaite représentante de la « Génération Chorus » ; qui plus est, trente ans exactement après les tout débuts de cette histoire avec Anne Sylvestre à la Une, elle, du n° 1 de Paroles et Musique. « Elle le sait, ça, Olivia ? me demande-t-il. Qu’elle a bouclé ce cycle de trente ans ?... Il faut lui dire que la page que vous aviez ouverte avec Anne Sylvestre, alors qu’elle venait tout juste de naître, s’est refermée avec elle ! » Une page en forme de jardin extraordinaire planté d’arbres à chansons de toute espèces, du pin Sylvestre à l’olivier Ruiz… 

Justement (prémonition ?), pour ce dossier du n° 68 de Chorus, Daniel Pantchenko, parlant à Olivia de son nouvel album, Miss Météores, et de sa première chanson, Elle panique, notait sa proximité d’esprit (« Elle panique à l’idée d’en faire trop / De vieillir prématurément / […] Fous-moi la paix, ma vieille caboche / Je suis rincée / Tu ne me fous pas la pétoche / Et je ne veux plus t’écouter… ») avec une chanson d’Anne Sylvestre, Carcasse (1981), où celle-ci apostrophe son corps (« Faut que tu marches ou que tu casses / Mais je te regarde en face / Il n’y a pas de quoi prendre peur / […] Et quand tu arriveras au bout / Pourvu que ça moi qui veille / On s’arrangera bien ma vieille / Pour résister encore un coup »). Et Olivia d’acquiescer : « Que ce soit le corps ou la tête, je crois que le combat contre ses démons et ses angoisses est un thème universel qu’on aborde tous… »

   

Oui, ce soir-là, trente ans de chanson nous contemplaient. Un demi-siècle même, puisqu’à la parution du n° 1 de Paroles et Musique, au printemps 1980 (cela fait tout drôle aujourd’hui de penser que dans le même temps venait au monde une petite Olivia appelée à tourner la dernière page de cette histoire…), Anne Sylvestre comptait déjà vingt-deux ans « et quelques poussières » de carrière… et c’était néanmoins, la chanteuse le rappelait elle-même, sa toute première couverture de magazine !

  

PM1

   

Une fois prise notre décision de rentrer d’Afrique (voir dans ce blog « En guise de prologue » et « Ballade en mer Rouge ») pour créer le journal qui manquait alors de toute évidence à la chanson française, s’était posée la question de l’artiste à mettre en Une (et en « dossier ») du premier numéro. Finalement, nous avions choisi d’inscrire cette aventure (le terme est juste, car nous n’avions que notre détermination, notre envie de partage… et nos petites économies pour espérer pouvoir « tenir » environ un an) sous le signe du féminisme (et donc de l’humanisme), à travers l’œuvre exceptionnelle d’Anne Sylvestre, dont le contenu résonnait très fort en nous.  

En ce temps-là, nous participions à la naissance d’une nation, la République de Djibouti, et de sa presse en particulier où, très vite, j’ai fait fi d’un tabou séculaire en lançant un débat public national – prolongé jusqu’à l’Assemblée – sur les tragiques mutilations sexuelles dont étaient systématiquement victimes les petites filles. Je ne parle pas de l’excision, mais bien de l’impensable, de l’inimaginable, de la si cruelle infibulation, pratiquée (à tort) au nom de l’islam dans toute la Corne de l’Afrique, avec, à vie pour les malheureuses, des conséquences dramatiques ; sans parler de l’immédiate mortalité infantile.   

Bref. Ce n’est pas le lieu ici de parler du combat des femmes de cette région du monde pour le respect de leur intégrité physique : comme celle des antifranquistes parqués dans les camps infâmants de l’exil en « pays libre », c’est encore une autre histoire. Sauf que cette action menée sur le terrain, cette vive sensibilisation de notre part aux droits fondamentaux de la femme, expliquent en partie notre choix d’Anne Sylvestre pour incarner d’emblée la « philosophie » de Paroles et Musique. D’autant que Benoîte Groult, venue se rendre compte sur place de la situation et nous rencontrer (elle venait de créer F Magazine, trois ans après le succès de son livre Ainsi soit-elle), était aussi une admiratrice de ladite Anne. Pour l’anecdote (et le plaisir de boucler une autre boucle), je demanderai ensuite à Benoîte, en 1985, de bien vouloir nous faire l’honneur d’écrire, pour le n° 51 de Paroles et Musique, le compte rendu de la rentrée parisienne d’Anne Sylvestre à l’Eldorado-Bobino – beau souvenir (nous étions allés ensemble au spectacle) et superbe article !  

Le dernier album d’Anne sorti avant la création du « mensuel de la chanson vivante », en 1978, était absolument somptueux : J’ai de bonnes nouvelles, Frangines, Mon mystère, Un bateau mais demain, Douce maison, La Faute à Ève« Un sommet… pour le moment », noterais-je en chapeau du long entretien qui eut lieu chez elle au printemps 80. Douce maison – sur le viol ? « Cela faisait des années que je cherchais à l’écrire, m’expliqua-t-elle. J’ai mis trente-quatre ans à trouver le meilleur biais pour aborder le sujet du viol. Je ne l’aurais pas chantée si je ne l’avais pas estimée réussie. » Et La Faute à Ève, chanson tordante dans la forme et l’interprétation et si pertinente dans le fond, qui marquait alors la conclusion définitive de son tour de chant ? « Oui, je pars là-dessus et je n’en remets jamais d’autres parce que ce n’est pas possible. Après le cri qui termine cette chanson, qu’est-ce que je pourrais dire d’autre ? »  

Pendant qu’à Carcassonne le bébé de la famille Blanc babillait à peine, à Paris la grande dame de la chanson française retraçait sans la moindre impatience, pour nous et les hypothétiques lecteurs d’un journal encore à naître, le fil de sa carrière. Depuis l’origine : « C’était en novembre 1957 à la Colombe… » Après un premier album où se distinguèrent un peu Maryvonne, Porteuse d’eau, Les Cathédrales et Mon mari est parti, il fallut attendre 1964 pour qu’un premier titre marque vraiment le public : T’en souviens-tu la Seine… à découvrir ou à réécouter – mais sûrement à voir pour la toute première fois – dans ce véritable document vidéo.

On passa rapidement en revue les grandes chansons qui suivirent, pour prendre le temps de parler surtout des incontournables (même si je n’eus pas la place de tout conserver de cette interview). Non tu n’as pas de nom (1974) : LA chanson sur l’avortement, Une sorcière comme les autres (1975) : un manifeste à elle seule, Les gens qui doutent (1977) : MA chanson préférée depuis lors… et puis, la même année, Clémence en vacances, dont j’ose croire que l’humour viendrait à bout du plus borné des machos : « L’humour, soulignait-elle, c’est une façon de faire passer bien des choses qui ne passeraient pas si on les disait autrement. Et puis c’est nécessaire, j’exprime ce que je ressens avec ma sensibilité. J’aime bien rire, je ris beaucoup, et j’estime qu’il doit y avoir des moments de détente dans un tour de chant… »  

Son tour de chant justement. Comment arriver à le composer avec un tel répertoire ? « Je mets toujours les chansons les plus récentes, celles qui sont indispensables comme Clémence, Une sorcière comme les autres, Non tu n’as pas de nom, et je m’efforce aussi d’en chanter trois ou quatre anciennes. Mais le tri est douloureux, et ça devient naturellement de plus en plus difficile. »  

Puis on évoqua l’album suivant, qui constituerait un an plus tard un autre sommet de son œuvre, avec Carcasse, déjà cité, Sur le fil, Dans la vie en vraiRose, Lâchez-moi... Sans oublier cette manière de profession de foi, Si je ne parle pas (« cependant que je chante / Si je n’explique pas le sens de mes chansons / Si je ne cite pas d’aventures touchantes / Et si je me présente sans trop de façons / Ce n’est pas voyez-vous que j’aie de l’arrogance / Mais j’en dis bien assez dans mes chansons je pense / […] Je sais qu’il y en a et ça me désespère / Qui se plaindront encore que je ne parle pas… »). Ce jour-là, pour parler, on parla ! On dialogua beaucoup, longtemps… alors que nous étions totalement inconnus des gens du « métier » et que, comme le funambule de Sur un fil, nous travaillions à ce premier numéro sans filet : imaginez que, fâchée par une de mes questions, l’artiste se soit brusquement mise en vacances de cet intrus (qui plus est fraîchement débarqué « des colonies », comme disaient encore certains nostalgiques réacs), à l’instar de la « Clémence » de la chanson… 

Pourquoi le cacher ? Au moment de lancer l’entretien, j’étais dans mes petits souliers, surtout après qu’Anne eut répliqué formellement de façon cinglante à ma première question (« On a beaucoup utilisé le terme “Brassens en jupons” pour vous qualifier… »« Je trouve aberrant qu’après vingt-deux ans ce qualificatif demeure encore ! C’est irritant et profondément injuste. La femme est considérée comme un genre mineur par rapport à l’homme… On n’a jamais eu l’idée de dire d’un jeune chanteur qu’il était “un Sylvestre en caleçons” ! C’est pourtant la juste traduction d’“un Brassens en jupons”… »). Mais elle se montra disponible tout le temps qu’il fallut, blagueuse, charmante et professionnelle jusqu’au bout des ongles. À la fin, je n’y tenais plus de ne pas comprendre pourquoi la plus grande ACI de la chanson française contemporaine, avec Barbara, était aussi « tricarde » dans les grands médias : 

« Depuis le début de cet entretien, je m’interroge sur cette réputation d’agressivité qu’on vous a faite…

– Ah ! oui, l’agressivité… Si j’avais été un homme, j’aurais eu du caractère. Mais une femme n’a que mauvais caractère. On n’a pas le droit d’être agressive. Or, si je ne l’avais pas été, agressive – entre guillemets – je serais morte ! L’« agressivité », la volonté en réalité, c’est une qualité de survie. »  

Voilà. La suite demanderait… une vie de trente ans, avec des centaines d’autres rencontres jusqu’à celle d’Olivia Ruiz. Mais pas plus qu’on ne refait l’histoire, on ne la revit. On peut tout juste tenter de la raconter. C’est à la fête champêtre de Lutte Ouvrière où Anne était programmée quelques jours après notre entretien que je prendrai la photo qui fera la Une du n° 1 de Paroles et Musique. Quel souvenir ! Des centaines de spectateurs enthousiastes mais une toute petite scène pour l’accueillir et une guitare sèche, une contrebasse et une sono riquiqui pour tout bagage. Dans ces conditions (du plein air, en plus), le talent est obligatoire (et l’absence de talent rédhibitoire) !

   

Chez Leprest

Printemps 1980… Printemps 2010 : dans un monde dominé chaque jour davantage par le narcissisme et l’égocentrisme (sans parler du financier), et ce dans tous les domaines, des politiques censés s’occuper des intérêts collectifs jusqu’au quidam de base (avec ces réseaux prétendument sociaux qui, trop souvent, ne font que refléter l’individualisme, le repli sur soi), dire qu’on a vécu trente ans en pratiquant l’altruisme (parce que cela nous faisait plaisir de partager nos petits bonheurs), c’est presque incongru. En tout cas bien étrange… et définitivement incompréhensible pour les ennemis d’un monde où les hommes (et les femmes) vivraient sinon d’amour du moins sans chercher à duper (ou à écraser) systématiquement leurs semblables. C’est pourtant la réalité que nous aurons vécue ensemble… et que nous continuons de vivre à travers ce blog. Et ÇA – quelque stratégie machiavélique et préméditée qu’on cherche une nouvelle fois à exercer à notre encontre –, personne ne pourra jamais nous l’enlever.  

Dernière précision : s’il fallait un autre lien pour unir Anne Sylvestre et Olivia Ruiz (photographiée dans notre dernier numéro par Francis Vernhet), celui-là se nommerait… Allain Leprest. Les deux sont chez Leprest comme elles étaient chez nous. Ou comme elles sont chez elles, comme à la maison. Dans le volume II de Chez Leprest (voir la « Chanson d’automne » de Si ça vous chante), elles interprétaient l’une, Sarment, et l’autre (qui avait déjà enregistré Tout c’qu’est dégueulasse porte un joli nom dans le volume I), La Dame du dixième. L’occasion, enfin, de rappeler que la première grande fête de Paroles et Musique en juin 1985, entre plusieurs dizaines d’artistes et de professionnels de terrain, avait réuni – chez nous – une certaine Anne Sylvestre, of course, et un jeune talent prometteur (c’était leur première rencontre), un certain Allain Leprest qui, dès 1983 (son premier album ne sortirait qu’en 1986), défrayait déjà la chronique (avec un premier article national) dans notre mensuel. Quant à Olivia, elle prenait alors, à cinq ans, ses premiers cours de danse… Vous dansiez, j’en suis fort aise, eh bien chantez maintenant ! Oui, continuez à chanter, tous et toutes, le chant du monde. Et tant qu’il y aura des hommes, si ce n’est pas ou plus « Mauricette et Fredo », il y aura toujours quelqu’un, quelqu’une pour faire chorus au bout de la ligne.  

 

Olivia Ruiz – Eight o’clock – Six mètres

 

Il suffit de s’y mettre. De Six mètres, dirait Allain Leprest qui écrivit spécialement ce texte magnifique (attention, chef-d’œuvre !) pour Olivia. Soyez patient(e)s, il intervient ici en morceau caché après une très brève chanson en anglais, Eight o’clock (de et interprétée avec le groupe Coming Soon). Six mètres, enregistré en duo avec Christian Olivier des Têtes Raides. Cette fois la (grande) boucle est vraiment bouclée : « Six mètres, plus que six mètres pour couper la ligne d’arrivée… / Et soudain l’envie de plus rien / Ou juste de bloquer les freins / L’envie de faire sauter la chaîne… / Déserter à vingt centimètres / À vingt centimètres du fil… / Et puis s’y mettre / Mais s’y mettre tous / Ni Dieu devant ni chien aux trousses / S’y mettre, s’y mettre tous / Et plus de maître / Que le désir d’être et renaître / Se redresser, lever la jambe, être ensemble / Vainqueurs… tous ensemble. »  

(Cet article – le 31e de Si ça vous chante, comme pour célébrer symboliquement notre entrée dans une 31e année en chanson – est dédié à « Bubu », qui sait pourquoi, avec tendresse et affection ; et bien sûr aux membres de notre ex-Dream Team, dont certains, amis à la vie, à l’amour et à la mort, nous ont accompagnés fidèlement durant ces trois décennies.)

Partager cet article
Repost0